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CAFE LIBERTE: LA SCIENCE ECONOMIQUE ET LES MATHEMATIQUES

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Nous aurons l’honneur de recevoir le professeur Alain GOERGEN. Polytechnicien, licencié en histoire et docteur en économie, il enseigne cette matière à l’ENS de Cachan. Auteur de La dynamique économique aux éditions Economica, ouvrage portant sur l’utilisation pratique de certains logiciels mathématiques pour la modélisation économique, il a par ailleurs publié des articles scientifiques sur le chaos, et sur l’économie politique en compagnie de G. Abraham-Frois dans la Revue d’Économie politique.

La science économique connu un tournant majeur il y a un peu plus d’un siècle. Science descriptive, elle faisait auparavant principalement appel à la narration historique et à la philosophie politique. Depuis lors, elle fait grandement appel aux mathématiques, à la fois pour la description des phénomènes et pour les raisonnements qui s’y fondent. Or la carte n’est pas le territoire. Les mathématiques, par leur exactitude intrinsèque, donnent l’illusion que tout ce qu’elles modélisent serait parfaitement modélisé. Non seulement ce n’est pas le cas, mais une modélisation mathématique inappropriée peut fort bien conduire à des raisonnements aux biais abscons.

Aussi la mathématisation de la science économique, bien qu’intensément pratiquée de nos jours, ne va pas de soi. Elle donna lieu à des débats passionnels notamment entre les foyers de la révolution marginaliste qui, à la charnière du 19ème et du 20ème siècle rendit scientifiquement périmée l’œuvre de Karl Marx fondée sur la valeur-travail alors même que le marxisme débutait son immense trajectoire politique. Parmi ces foyers, Léon Walras et son Ecole Française, piliers du néoclassicisme, furent pionniers d’une mathématisation d’autant plus contestable qu’elle faisait appel à des processus instables dont il n’avait pas nécessairement conscience, alors que Karl Menger avec son Ecole Autrichienne chère aux libéraux avaient une approche légitimement plus classique, complétée par un distingo très marqué entre l’observation historique et la déduction rationnelle pas nécessairement mathématique. Ce débat qui animait la microéconomie pour les fugaces équilibres de marché se prolongea avec la macroéconomie et les subtils phénomènes monétaires. Le démocrate social John Maynard Keynes, grand adversaire de l’Ecole Autrichienne, concédait que l’économiste devait être un mathématicien mais aussi un philosophe, un historien et un politique. Il restera à la postérité pour avoir mobilisé les mathématiques afin de fournir à la classe politique et à la bureaucratie les instruments incertains prétendant légitimer de douteuses manipulations monétaires et sociofiscales, motivant incidemment l’élaboration d’agrégats de comptabilité nationale et la technocratisation centraliste de l’économie souhaitée par les marxistes. Récupérant ces outils mais y introduisant des concepts supplémentaires tels que l’anticipation rationnelle, Milton Friedman et son Ecole de Chicago développèrent la relativement libérale école monétariste qui supplanta à son tour le keynésianisme dans la réflexion académique, montrant avec les outils du keynésianisme les dangers des manipulations monétaires keynésiennes. Cependant le monétarisme fut principalement mis en œuvre dans une version maximaliste, voire outrancière, de sa partie commune avec le keynésianisme.

Au début du 21ème siècle, la remise en question de la mathématisation de la science économique séduit de plus en plus d’universitaires. En outre dans d’autres disciplines les méthodes de modélisation ont considérablement évolué grâce à l’informatique. La place des mathématiques dans la science économique est donc de nouveau remise en question.

Alain Goergen constate que la question de l’utilisation des mathématiques dans le domaine de l’économie fait l’objet de débats. Ce qui lui semble poser problème est, non pas l’introduction de mathématiques en sciences économiques, mais la transposition sans précautions à cette discipline des méthodes et des formulations des sciences exactes. Les mathématiques lui semblent mériter une place très importante en sciences économiques à condition d’y introduire des concepts et des méthodes adaptés.

La méfiance de l’Ecole Autrichienne envers l’utilisation des mathématiques en sciences économiques connait elle un nouveau souffle ? Les mathématiques peuvent elles être utiles à la science économique ? La mathématisation économique léguée par le 20ème siècle est elle fondée ? N’est-elle pas sujette à des biais pernicieux ? Quelle confiance ou quelle défiance mérite t elle ? D’autres méthodes de modélisation, recourant à des techniques mathématiques plus adaptées, ou recourant à des modélisations informatiques plus proches de la description naturelle du comportement des agents économiques ne seraient elles pas préférables ? C’est autour de ces questions que nous vous proposons de dialoguer le lundi 27 janvier 2014 à 20h00 avec Alain Goergen au café Le Coup d’Etat, 164 rue Saint Honoré, 75001 Paris !

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