Coup de tonnerre. Par jugement en date du 30 avril 2014, le tribunal de grande instance de Versailles a refusé d’accéder à la demande d’adoption plénière de l’épouse de la mère biologique d’un enfant conçu à l’étranger par procréation médicalement assistée (PMA).
C’est une histoire devenu classique de nos jours, l’enfant avait été conçu via un protocole de procréation médicalement assistée à l’étranger (en l’espèce en Belgique). Il convient de rappeler qu’en France, la PMA n’est ouvert qu’aux couples hétérosexuels mariés ou en couple.Le problème de droit qu’avait à trancher le tribunal de Versailles était le suivant :Le recours à l’étranger d’une PAM interdite en France pour concevoir l’enfant doit-il faire échec à la demande d’adoption plénière présentée par l’épouse de la mère biologique ?
Les juges versaillais ont estimé que « le procédé qui consiste à bénéficier à l’étranger d’une assistance médicale à la procréation interdite en France, puis à demander l’adoption de l’enfant, conçu conformément à la loi étrangère mais en violation de la loi française, constitue une fraude à celle-ci ».Le recours à cette notion est fortement contestable et pourrait avoir de graves conséquences si le raisonnement était poussé jusqu’au bout.En effet, plusieurs commentateurs ont, à juste titre, relevé que s’il y a fraude, elle est moins dans l’adoption que dans le procédé lié à la conception.Or « la cohérence voudrait […] que le ministère public puisse agir en contestation de maternité, afin de défaire le lien de filiation unissant l’enfant à sa mère biologique.
La pente de la solution conduit donc très directement, à faire un orphelin potentiel de l’enfant issue d’une insémination artificielle à l’étranger » (S. Bollée, A.-M. Leroyer et E. Pataut, L’État dans les chambres à coucher, Huffington Post, 7 mars 2014).En outre, le recours à la fraude pourrait d’autant moins justifié que depuis l’entrée en vigueur
de la loi n° 2013-404 du 17 mai 2013 consacrant le mariage pour tous, l’adoption par l’un des époux de l’enfant de son conjoint est ouverte dans les mêmes conditions à tous les couples.
Au cœur des débats parlementaires, la question de la PMA s’est posée pour les couples de femmes. Or, si la loi n’a pas formellement autorisé le mécanisme à leur égard, elle ne l’a pas non plus expressément condamné, comme le prouve le rejet de l’amendement visant à interdire l’adoption de l’enfant du conjoint conçu selon ce procédé. A ce sujet, il sera rappelé que Monsieur Erwann Binet, ex-rapporteur du projet de loi indiquait expressément : « en aucun cas, il a été dans l’intention du législateur de refuser l’adoption des enfants conçus par PMA ». Avec ce jugement s’ouvre une situation d’insécurité juridiqueEn effet, dans un cas strictement identique le tribunal de grande instance de Lilles a autorisé l’adoption.Ce problème a été relevé par Monsieur Xavier Gadat, secrétaire national du syndicat de la magistrature : « La décision de la cour d’appel de Versailles est rendue possible par le vide de
la législation, qui rend possible cette interprétation […]. On va interpeler les parlementaires car ce n’est pas acceptable » (in J.- A. Richard, Refus d’adoption après une PMA, RTL.fr, 5 mai 2014). A cette insécurité se rajoute la lâcheté des pouvoirs publics qui ont passé sous silence
la question de la PMA alors même qu’ils ont introduit dans le débat parlementaire une proposition de loi visant à améliorer le statut du beau-parent