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Quel avenir pour l’Education nationale en 2017 si François Fillon est élu ?

On ne peut qu’être d’accord avec la priorité identifiée par François Fillon : FAIRE . Que de temps perdu ! Et l’ancien ministre de l’Éducation nationale est bien placé pour en juger. Pour comprendre ce qui sous-tend le projet Éducation de François Fillon, il est indispensable de tenir compte de son expérience passée.

En 2004, à sa demande, une concertation de grande ampleur, tout à fait exemplaire, est organisée dans les établissements scolaires, et donne lieu à la Loi d’orientation et de programme pour l’avenir de l’école du 23 avril 2005 devant réformer en profondeur le système éducatif français. Mais François Fillon doit quitter, contre son gré, le ministère de l’Éducation nationale. Gilles de Robien lui succède. C’est donc lui qui mettra en oeuvre cette loi dite « loi Fillon ». Cette formulation permet sans doute de passer sous silence qu’elle est d’inspiration européenne ! Le grand public l’ignore encore.
Le  » socle commun de connaissances, de compétences et d’attitudes », introduit dans la Loi de 2005, présente ce que tout élève doit savoir et maîtriser à la fin de la scolarité obligatoire. Publiées au Journal officiel de l’Union européenne, le 30 décembre 2006, les compétences-clés constituent un cadre de référence européen et sont définies comme nécessaires à tout individu pour son épanouissement et son développement personnel, pour une citoyenneté active, enfin pour l’intégration sociale et l’emploi.
 
Le cadre de référence décrit 8 compétences clés : la communication dans la langue maternelle, la communication en langue étrangère, la compétence mathématique et les compétences de base en sciences et technologies, la compétence numérique, l’apprendre à apprendre, les compétences sociales et civiques, l’esprit d’initiative et d’entreprise, la sensibilité et l’expression culturelles.
En France, Inspection Générale et/ou Haut Conseil de l’Éducation décident de supprimer d’emblée « l’apprendre à apprendre » ! Et de ne conserver que 7 piliers sur les 8 préconisés. Ils transforment aussi l’ »esprit d’initiative et d’entreprise » en « initiative et autonomie ». Très révélateur ! Entrepreneuriat et entreprise sont alors des termes tabous à l’EN.
Gilles de Robien présente, à juste titre, cette loi comme une révolution copernicienne. Il s’agit, en effet, de faire comprendre à tous et surtout à l’Inspection générale que l’enseignement  » centré sur l’objet à étudier » doit céder la place à un enseignement « centré sur le sujet qui apprend ».
Cette Loi de 2005 prône donc l’interdisciplinarité. Mais, en 2007 le nouveau ministre nommé par Nicolas Sarkozy s’empresse de céder sur de nombreux points qui constituent l’armature de l’organisation à mettre en place. On ne tarde pas à lire dans un rapport de l’Inspection générale que ces compétences, dites « clés » ne s’accordent pas avec la mentalité française !
Le 10 sur 20 en langues vivantes sera donc vite transformé en « A2 », sans qu’il soit nécessaire de prendre en compte l’évaluation des 5 compétences requises… on comprend mieux pourquoi les compétences des élèves français en langues étrangères demeurent au plus bas niveau.
 
En 2012, le ministre socialiste nouvellement nommé met en place une énième commission chargée d’élaborer une « Refondation de l’école » ! Nous nous éloignons, à grands pas, des pratiques européennes qui font leurs preuves ailleurs et, comme l’indique le diagnostic de François Fillon :  » Derrière le modèle d’excellence et d’égalité de l’école de la République, se cache un modèle inégalitaire » :  » décrochage scolaire (pas seulement dans les banlieues), chômage des jeunes… » qu’il explique, à juste titre, entre autres par « la révolution technologique qui n’a pas délogé les connaissances au profit des compétences », les structures du système éducatif, « la prolétarisation mystique des enseignants ».

Le programme de François Fillon s’appuie sur 3 axes : Liberté, Diversité, Autorité

Commençons par l’autorité. Par autorité, François Fillon traduit ce qu’ailleurs, l’on nomme « Leadership », or les Français – jusqu’à maintenant – n’aimaient pas le « leadership », même au sommet de l’État, comme ils l’ont montré en 2012. Dans le microcosme de l’Éducation nationale, encore moins qu’ailleurs ! En revanche, on aime les discours sur l’autorité : parents et enseignants – nostalgiques de l’école d’hier – lui vouent un pouvoir incantatoire.
Par leadership, on entend à la fois, décentralisation, responsabilisation des acteurs à tous les niveaux : Région, établissement, salle de classe, etc. Il s’agit pour un président de la République de donner le pouvoir d’agir à ceux qui mettront en place les réformes radicales dont la France a besoin. Pour ce faire, tous les personnels, et notamment les enseignants, doivent être recrutés sur des compétences nouvelles devenues indispensables.
François Fillon propose, comme c’est le cas dans les pays voisins,  » des stages dans un établissement scolaire dès la première année d’université aux étudiants qui envisagent d’être enseignants… » C’est ensuite en partie sur la base des compétences révélées sur le terrain qu’ils devraient être recrutés ou non, comme en Finlande.
L' »autonomie » se retrouve dans presque tous les programmes politiques, mais pour François Fillon, elle semble toutefois précisée par deux termes, Liberté et Diversité :  » Le collège permettrait ainsi l’approfondissement des savoirs fondamentaux et l’ouverture sur le monde (langues, économie, numérique, environnement) ». Sa volonté de libérer et de diversifier semble aller jusqu’à accorder à tout établissement un réel pouvoir de décision sur l’agencement des heures par rapport aux programmes nationaux, sur la gestion financière et celle des ressources humaines.
Relevons la pertinence de certaines mesures mentionnées dans son programme :
– Une scolarité obligatoire à partir de 5 ans
– Une interdisciplinarité au collège favorisée par la bivalence des professeurs.
– La fin des 4 mois de vacances avec compensation salariale, mesure qui favorisera l’équité, car les vacances scolaires ne sont pas pour tous les élèves des moments d’épanouissement.
– Davantage de contrôle continu pour  » le brevet, nécessaire pour poursuivre au lycée, qui devrait effectivement attester de la maîtrise du socle commun de connaissances et pour le baccalauréat, qui devrait être plus solide dans son contenu et plus simple dans son organisation ».
– Rétablissement de la note vie scolaire : les compétences relationnelles font partie des compétences-clés.
– Revenir sur les aberrations du quinquennat 2012-2017 : extension des classes européennes, bilangues, internationales.
François Fillon veut « une politique d’innovation autour du numérique ». Nous lui suggérons de faire de la France un relai essentiel dans  » l’Agenda européen des nouvelles compétences clés » , un membre actif dans la « Coalition de l’Union Européenne pour les STEM (Sciences, Technologies, Ingénierie, Mathématiques) ». Le  » Pacte Européen pour la jeunesse » , les projets de la Banque Européenne d’Investissement ont vocation, non pas à rester à la marge du système scolaire, mais à être intégrés dans le système éducatif.
Certaines mesures préconisées par François Fillon rencontrent une hostilité infondée :
– Les établissements privés ne devraient plus être considérés comme une voie de contournement, car le libre choix des familles devrait prévaloir, comme dans de nombreux pays.
– La présidence des conseils d’administration n’a pas à être nécessairement confiée au chef d’établissement, à partir du moment où il cesse d’être un simple « gestionnaire » et où il est – enfin – en charge du management des équipes et du leadership de son établissement, car il ne peut être alors juge et partie.
– Port de l’uniforme : il pourrait contribuer à permettre aux élèves, d’identifier l’établissement scolaire, non plus comme un lieu de passage obligé, mais comme une organisation où chacun est là pour apprendre, dans laquelle chacun a sa place, un rôle dans une équipe, qui a choisi son projet d’école.
En conclusion, formulons un voeu : que François Fillon aille encore plus loin dans son projet au service des jeunes générations. Fort de la confiance qu’il inspirera aux Européens en s’attaquant – enfin – aux réformes structurelles dont le pays a besoin, il n’est pas impossible qu’il puisse aussi insuffler en Europe « l’envie de se concentrer sur quatre ou cinq priorités stratégiques ». Souhaitons que dans ces priorités figure en bonne place, l’emploi et la formation.
Article de Nelly Guet, consultante en éducation et membre du Parti libéral démocrate européen (ALDE), paru dans les Echos le 19 décembre 2016

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