Les banques centrales à la manoeuvre
Cet ajustement est présenté comme le maintien d’une politique très accommodante mais éventuellement réajustée au regard de la vigueur du cycle européen. Cette généralisation d’un discours moins accommodant a eu un impact sur les taux qui ont poursuivi leur rebond et a également généré un mouvement de repli des marchés actions.
Les statistiques économiques cette semaine ont globalement mis en lumière la poursuite de la reprise mondiale. C’est notamment aux Etats-Unis, avec la remontée des enquêtes ISM de juin, tant côté manufacturier que dans les services, qu’on assiste enfin à des surprises économiques positives. En zone euro, le PMI composite de juin, à 56,3, reste à un niveau très élevé. On notera que la reprise est plus homogène et que les pays qui accusaient un certain retard rejoignent le peloton, au point que le PMI français dépasse désormais celui de la zone euro.
L’actualité politique a été dominée par le regain de tensions en Asie avec la lancée d’un nouveau missile de la Corée du Nord de portée intercontinentale, les Etats-Unis reprochant à la Chine de ne pas contrôler son voisin. Par ailleurs, à l’heure où l’on craint une initiative américaine protectionniste, l’Union européenne et le Japon ont annoncé être sur le point de signer un accord de libre échange qui mettra fin aux droits de douane sur 99% des biens échangés.
Actions européennes |
Le marché européen réagit avec prudence aux signaux de normalisation de la politique monétaire de la BCE, ce que reflète la tendance baissière de la semaine. Les taux longs européens et l’euro (vs dollar) en ont profité pour monter fortement. Ce climat est favorable aux banques et aux valeurs financières. Côté secteurs, l’automobile ainsi que les valeurs minières sont aussi bien orientées cette semaine alors que la plupart des autres secteurs affichent des baisses.
Du côté des valeurs, Reckitt revoit à la baisse ses perspectives de hausse des ventes de 3 à 2% en raison de la cyberattaque du mois de juin. Les chiffres de l’automobile restent satisfaisants en France et en Europe, soutenant le secteur au niveau européen.
De nombreux contrats sont dévoilés cette semaine : Airbus annonce que son carnet de commandes s’étoffe pour 2017 (la société affiche 203 commandes nettes sur les six premiers mois de l’année et la livraison de 306 appareils sur la même période). Eiffage remporte un gros contrat dans le solaire pour la construction d’une centrale au Chili.
Nokia et Ericsson remportent des contrats afin de moderniser le réseau téléphonique de Telefonica.
Du côté des publications, Carrefour affiche un chiffre d’affaires de 21,8 milliards d’euros au deuxième trimestre, reflétant une accélération de la croissance dans toutes les zones (y compris en France) et dans toutes les branches d’activité. Néanmoins, le marché s’inquiète du niveau de marge pour la deuxième partie d’année qui pourrait être impacté par un investissement tarifaire dans les hypermarchés en juin. Bayer révise ses perspectives pour le deuxième trimestre et pour l’année notamment en raison de difficultés sur l’intégration de la division OTC de Merck&Co rachetée en 2014. Sodexo avertit aussi sur son niveau de croissance organique avec une nouvelle prévision de ventes de +1,5/2% vs 2,5/3% auparavant.
Sur le front du M&A, Amundi finalise l’acquisition de Pioneer Investments ce qui permettra au groupe d’entrer dans la phase effective d’intégration opérationnelle. LVMH a achevé sa prise de contrôle de Christian Dior avec plus de 94% des droits repris par sa holding Semyrhamis. Enfin, Axa pourrait céder sa division de gestion de fortune à Hong-Kong.
Actions américaines |
Nouvelle semaine de léger recul : le S&P abandonne 1,3% et le Nasdaq 2% au cours des cinq dernières séances.
Les taux ont continué de se tendre : le 10-ans américain atteint 2,37%, contre 2,15% il y a deux semaines. Les bons chiffres macroéconomiques ont naturellement alimenté ce mouvement. L’ISM manufacturier est ressorti à 57,8 (contre le mois précédent à 54,9). On retiendra la performance de la composante « nouvelles commandes » qui atteint 63,5, un niveau laissant peu de doute sur le dynamisme de l’activité réelle. La publication des minutes de la Fed révèle un manque de consensus au sein de l’institution, mais le calendrier prévisionnel n’est pas remis en cause : hausse graduelle des taux, réduction programmée du bilan, sans plus de détails.
La violence du mouvement sur les taux est la principale explication aux performances sectorielles hebdomadaires. Les financières sont les grandes gagnantes (+1,5%), suivies des matières premières et de l’énergie tandis que les secteurs perçus comme défensifs sont les grands perdants : immobilier à -3%, technologie à -2,6%, télécom à -2,5%.
Actions japonaises |
L’indice TOPIX a grappillé 0,2% au cours de la semaine en dépit d’une chute des marchés jeudi. Ce jour-là, l’indice Nikkei 225 a clôturé sous les 20.000 points pour la première fois depuis environ trois semaines. Les investisseurs ont choisi de prendre leurs bénéfices en raison des tensions en Corée du Nord et de l’incertitude politique au Japon après la défaite du PLD lors de l’élection de la nouvelle assemblée métropolitaine de Tokyo. Toutefois, les valeurs de l’automobile et de la sidérurgie ont encore eu le vent en poupe pendant la semaine en raison de la bonne tenue de la demande étrangère.
Les secteurs de la sidérurgie (+3,8%) et du matériel de transport (+2,8%) ont été les plus performants. Les constructeurs automobiles Subaru et Toyota Motor se sont adjugés respectivement 7,5% et 4,1% après l’annonce de solides ventes de voitures aux Etats-Unis en juin. Les sidérurgistes Nippon Steel & Sumitomo Metal (+3,8%) et JFE Holdings (+3,3%) ont également progressé.
En revanche, les secteurs Autres produits (-3,1%) et Papier et Pâte à papier (-1,5%) ont relativement souffert. Nintendo Co. a plongé de 7,2% et Toshiba a cédé 5,7%, dans la continuité de la semaine dernière. Les autres grands perdants de la semaine sont les sociétés pharmaceutiques telles que Daiichi Sankyo (-4,7%) et Shionogi & Co. (-3,4%).
Marchés émergents |
L’actualité des marchés émergents a été très calme cette semaine. En Inde, la taxe sur les biens et services est entrée en vigueur samedi dernier.
Cette taxe, dont le taux est harmonisé à l’échelle du pays, remplace les différentes taxes qui existaient dans les 29 Etats fédérés.
Le quotidien chinois People’s Daily, qui appartient à l’État, a publié deux éditoriaux dénonçant l’influence malsaine du jeu Honour of Kings de l’opérateur mobile Tencent sur ses utilisateurs, en particulier les mineurs. Face à ces critiques, l’opérateur a décidé de limiter l’accès au jeu pour les moins de 18 ans. Cette limitation et celles qui suivront probablement ne devraient pas avoir d’impact substantiel sur la rentabilité de l’entreprise car les jeunes joueurs n’ont pas un grand pouvoir d’achat.
En Chine toujours, la Commission nationale sur le développement et les réformes a vanté le rôle de l’économie du partage dans la croissance et les créations d’emplois liées à l’innovation, qui passe par un recours aux technologies d’information et une affectation des ressources optimisée. Parmi les mesures préconisées favorisant l’accès à l’économie du partage, on trouve notamment la simplification des procédures d’autorisation, l’abaissement des barrières à l’entrée et une fiscalité allégée. L’actualité du secteur de l’assurance a également été porteuse : la Chine introduira à titre expérimental les comptes d’épargne-retraite individuels à imposition différée d’ici la fin de l’année, une mesure qui s’inscrit dans le cadre de la réforme des retraites complémentaires. En Corée du Sud, l’inflation s’est modérée à 1,9%.
Au Mexique, l’indice PMI en juin s’est avéré supérieur aux estimations du consensus. L’indice manufacturier est ressorti à 54,1 (alors que le consensus tablait sur 48,6), franchissant le seuil des 50 points pour la première fois depuis neuf mois. L’indice des services a également augmenté, à 54,5 (alors que le consensus tablait sur 52). Confirmant cette tendance, Walmex a fait état d’une progression de son chiffre d’affaires à périmètre constant de 7,2% en juin, un chiffre meilleur que prévu. La fréquentation des magasins Gap au mois de juin est ressortie en hausse de 12,9% sur un an (un chiffre supérieur à l’estimation du consensus, ainsi qu’à la progression de 11% sur un an enregistrée en mai).
La banque centrale mexicaine a publié le compte-rendu de sa dernière réunion. S’il est empreint d’une certaine orthodoxie, il ne laisse pas entrevoir de nouveaux relèvements de taux directeurs. Terrafina a annoncé une augmentation de capital destinée à financer des acquisitions. Les valeurs mexicaines sont valorisées à hauteur de 16 fois leurs bénéfices et leur BPA est en hausse de 17%. Une révision à la hausse des prévisions de bénéfices nous semble possible et le marché mexicain présente une décote par rapport à sa moyenne historique. Nous restons optimistes.
Matières premières |
La forte volatilité sur les prix du pétrole reste de mise, entraînant une certaine gageure à en expliquer les mouvements. La première baisse, en 24 semaines, du nombre de foreuses en activité aux Etats-Unis (-2 rig sur un total de 756 dans le pétrole) a contribué à rapprocher le Brent des 50 dollars le baril (47 dollars le baril pour le WTI). Cependant, après huit séances consécutives de hausse, la correction a été significative cette semaine, accentuée par un retour de positions vendeuses des traders, lesquels s’étaient désengagés au cours des semaines précédentes.
Pourtant, le mois de juin a vu une baisse mensuelle de 7% des exportations russes à 5,4 millions de barils par jour, pour une production de 10,95 millions de barils par jour qui elle reste stable. La demande aux Etats-Unis, source d’inquiétudes ces derniers mois, est meilleure qu’attendu et ressort en hausse de 260.000 barils par jour en avril contre une estimation d’une baisse de -490.000 barils par jour selon les statistiques hebdomadaires. En fait, nous pensons que le marché s’est auto convaincu qu’une coupe supplémentaire de production de l’OPEP est nécessaire. La Russie ayant signifié qu’elle s’opposerait à toute proposition en ce sens lors de la prochaine réunion OPEP/non-OPEP a suffi à alimenter le pessimisme de court terme. Même la publication des stocks hebdomadaires aux Etats-Unis, pourtant très encourageante, n’a pas permis d’inverser la tendance de façon durable sur les prix. Les stocks de brut ont baissé de 6,3 millions de barils, conjugué à une baisse des produits pétroliers, amenant une baisse totale des inventaires de 13,4 millions de barils, la plus forte depuis septembre dernier.
Quant au rebond de la demande d’essence, il se confirme. Les importations sont au plus bas depuis près de deux mois (un indicateur de moindre exportation des pays de l’OPEP).
Par ailleurs, l’activité manufacturière reste solide en Chine. Si le PMI de juin était déjà connu à 51,7, le PMI acier à 54,1 en juin (54,8 en mai) se maintient à des niveaux élevés, alors que la génération d’électricité, autre indicateur de l’activité manufacturière, progresse de 6,7% en mai à comparer à +6,6% au cours des quatre premiers mois de l’année.
L’once d’or a corrigé en début de semaine, à 1220$/oz, sous l’impact d’un petit renforcement du dollar et de rendements du Trésor plus élevés. La publication du FOMC n’a pas révélé de nouvelles informations quant à la politique de la Réserve fédérale. Le consensus table toujours sur une prochaine hausse de taux en décembre prochain.
Dettes d’entreprises |
Crédit
Le marché du High Yield a été assez calme en début de semaine, avec une légère baisse des taux allemands, en partie expliquée par le discours dovishd’un membre du directoire de la BCE. Mais en fin de semaine, le marché s’est révélé baissier, avec un écartement de sept points entre jeudi et vendredi du Xover suite à une remontée des taux souverains. Celle-ci a suivi une adjudication décevante sur la dette française 30 ans et le discours hawkish de la BCE.
Le marché primaire High Yield a été très dynamique cette semaine. Deux grands acteurs du transport maritime ont émis un bond pour refinancer leur dette existante : Hapag-Lloyd (B+) a émis un Bond Senior 7 ans de 450 millions d’euros, CMA a finalisé son émission pour émettre 600 millions de dollars de dette senior 5 et 7 ans. La société de construction italienne, CMC di Ravena(B2), a émis 250 millions d’euros pour refinancer ses dettes court terme avec un coupon de près de 7%.
La société de packaging Kloeckner Pentaplast (B) a émis un PIK de 400 millions d’euros pour financer un dividende et une acquisition à 8,5% de coupon. Du côté de l’Investment Grade, Atlantia (BBB /Baa2), qui opère dans le secteur des infrastructures aéroportuaires et autoroutières italiennes, a émis une Senior Unsecured 10 ans pour un milliard d’euros. Enfin, le segment des financières a été assez dynamique avec Bankia qui a émis sa première AT1 pour 750 millions d’euros et Caixabank qui a émis une Tier 2 pour un milliard d’euros.
On peut noter la forte performance des souches subordonnées Monte Paschiaprès que la Commission européenne a accepté sa recapitalisation préventive avec l’aide de l’Etat italien. Après celle-ci, Monte Paschi procédera à son plan de restructuration, afin d’assurer sa viabilité à long terme.
Coté fusions-acquisitions, WorldPay (Ba2/BB) et Vantiv (non noté) ont annoncé avoir conclu un accord de principe sur les caractéristiques d’une potentielle fusion. Ces deux prestataires de services de paiement espèrent pouvoir réaliser des économies de coûts en fusionnant, et créer un groupe à portée globale, avec des implantations en Asie, Amérique du sud, Europe et Etats-Unis. En 2016, Vantiv a réalisé 839 millions de dollars d’EBITDA et Worldpay a réalisé 549 millions de dollars d’EBITDA. Après fusion, le nouveau levier du groupe serait de 4.5x contre 3.2x pour Worldpay et 3.7x pour Vantiv.
Convertibles
Le marché primaire des obligations convertibles est resté en veille cette semaine, à quelques jours du coup d’envoi de la saison des résultats du deuxième trimestre. Dans l’actualité des entreprises, en Europe, le groupe de distribution Carrefour a annoncé un chiffre d’affaires en hausse de 6,1% mais la période des soldes en France en Europe et les investissements réalisés pèseront sur ses marges. Steinhoff (via Conforama) est en passe de prendre une participation de 17% au capital de Showroomprivé (pour environ 160 millions d’euros en numéraire).
Par ailleurs, Steinhoff a annoncé une série de roadshows prochainement dans l’optique du placement de deux nouvelles émissions obligataires classiques en euros à six et neuf ans. Enfin, dans le feuilleton Ubisoft/Vivendi, Ubisoft proposera la nomination de deux nouveaux administrateurs indépendants lors de l’assemblée générale ordinaire qui se tiendra le 22 septembre 2017, l’objectif étant de conforter son indépendance.
Aux États-Unis, Tesla a vu sa capitalisation boursière fondre de 17% depuis le début de la semaine sur fond d’inquiétude quant aux livraisons, à la sécurité et à la concurrence de plus en plus vive (Volkswagen prévoit de livrer en 2020 les premiers exemplaires de son unique modèle électrique baptisé Neo, qui bénéficiera d’une autonomie de 600 km).