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Allocution d’ouverture de la Présidente von der Leyen à l’occasion de la conférence de presse conjointe avec le Président Michel suite à la réunion du Conseil européen extraordinaire du 18 avril 2024

Les quatre dernières années ont sans l’ombre d’un doute montré à quel point il est important de renforcer notre compétitivité et notre marché unique. Permettez-moi de vous donner trois exemples évidents. Cela est vrai pour notre capacité à développer et à déployer à grande échelle les technologies nécessaires à notre double transition. Cela est également indispensable si nous voulons être des acteurs d’envergure mondiale dans le domaine du numérique et pas seulement des consommateurs de produits ou de services numériques créés ailleurs. Enfin, les ondes de choc de l’invasion russe de l’Ukraine nous ont montré à quel point il est crucial de s’appuyer sur une industrie européenne de la défense qui soit compétitive et robuste.

Je remercie donc chaleureusement Enrico Letta pour son excellent rapport et sa présentation d’aujourd’hui. Tout cela alimente notre réflexion sur les priorités d’action. Je vois quatre grands domaines d’action. Le premier est en effet l’accès aux capitaux. Les arguments économiques en faveur d’une union des marchés des capitaux sont très clairs, il est inutile de les répéter ici. Le professeur Letta indique que chaque année, 300 milliards d’euros d’économies européennes sont détournés vers l’étranger, principalement en direction des États-Unis. C’est autant d’argent qui manque au développement de nos entreprises dans l’Union européenne. Et cette situation s’explique par la fragmentation de nos marchés des capitaux et de notre système financier. Nous l’avons tout compris quand Christine Lagarde, lors de sa dernière intervention au sommet de la zone euro, a déclaré très clairement que les entreprises de l’Union européenne pourraient obtenir un financement supplémentaire à hauteur d’environ 470 milliards d’euros par an sur les marchés des capitaux si nous parvenions à achever l’Union des marchés des capitaux.

Il nous faut donc prendre une série de mesures décisives, qui ont fait l’objet de nos discussions aujourd’hui. Premièrement, en effet, nous devons réduire les coûts supportés par les entreprises et les investisseurs en ce qui concerne les marchés des capitaux. Deuxièmement, nous devons renforcer et harmoniser la surveillance des acteurs les plus importants. Et, troisièmement, nous devons donner de la prévisibilité aux investisseurs sur des sujets tels que l’insolvabilité. Et avec les conclusions d’aujourd’hui, les dirigeants appellent vivement à avancer sur ces sujets et, bien entendu, sur d’autres sujets abordés plus loin. Parce que nous devons nous concentrer sur un cadre européen simple qui apporte une valeur ajoutée, réduit les coûts et améliore l’accès des entreprises aux capitaux dans toutes les régions.

La deuxième priorité examinée est la réduction du coût de l’énergie. Les coûts de l’énergie continuent de peser sur notre compétitivité européenne. Les industries à forte intensité énergétique telles que l’acier, le verre, le ciment, les produits chimiques ou les engrais, sont particulièrement touchées. Nos coûts de l’énergie ont atteint à nouveau leur niveau d’avant-guerre, mais ils demeurent structurellement trop élevés. Et les données actuelles montrent qu’une grande vague de nouveaux projets d’exportation de GNL arrive sur le marché à partir de l’année prochaine. C’est une bonne nouvelle. Ces projets vont accroître l’approvisionnement mondial en GNL de 50 %. Nous passons donc d’un monde de pénurie de gaz à l’inverse, à un monde où nous pourrions bientôt voir une abondance de gaz sur le marché. Et compte tenu de l’importance nouvelle que revêt le GNL dans le bouquet énergétique de notre Union européenne, cela entraînera une baisse significative des prix du gaz. Dans le même temps, cela nous donnera le temps de construire la nouvelle économie des énergies propres, et ces énergies seront avant tout produites localement. Et comme nous le savons, les énergies renouvelables sont beaucoup moins chères. D’un point de vue structurel, nous pouvons réellement opérer un changement nécessaire.

La troisième priorité est de remédier au manque de compétences dont souffre notre économie. Il s’agit d’un problème grave. C’est pourquoi nous avons fait de 2023 l’année européenne des compétences. Nous savons tous que, sur notre marché du travail, le potentiel inexploité est limité. Et ce parce que nous avons une économie caractérisée par des niveaux d’emploi historiquement élevés. Nous devons donc vraiment examiner chaque personne susceptible d’entrer sur le marché du travail. Nous devons former autant de jeunes chômeurs que possible. Nous devons améliorer l’accès des femmes au marché du travail, ainsi que celui de nos travailleurs âgés. Et, bien entendu, nous avons besoin d’une migration régulière. L’année dernière, ce sont 3,5 millions de migrants qui sont entrés de manière régulière dans l’Union européenne et ont rejoint notre main-d’œuvre, invités par les entreprises. Ce chiffre est trois fois plus élevé que celui de l’immigration irrégulière. Mieux nous gérerons notre migration régulière, plus nous pourrons et devrons lutter contre la migration irrégulière ainsi que les passeurs et les trafiquants qui en sont à l’origine.

En outre, nous avons pris de nombreuses initiatives dans le domaine des compétences parce que nous avons besoin, bien entendu, non seulement des formations, mais aussi de la reconversion et du perfectionnement professionnel de la main-d’œuvre. Des financements de l’Union européenne à hauteur de 65 milliards d’euros ont été alloués aux États membres pour que ceux-ci investissent dans la formation, notamment par l’intermédiaire de NextGenerationEU et du FSE+. Nous poursuivrons nos efforts dans ce domaine avec les partenaires sociaux. C’est pourquoi la déclaration de La Hulpe, que nous avons signée hier, est si importante.

Enfin, nous comprenons tous que nous ne pouvons pas être compétitifs sans le commerce. 90 % de la croissance économique mondiale devrait être créée en dehors de l’Union européenne, dans les années à venir. L’Europe est un continent d’échanges commerciaux, beaucoup plus ouvert que les États-Unis par exemple, et une part importante de notre prospérité est issue des contacts commerciaux que nous entretenons. L’Union européenne est sans égal en matière de négociation d’accords commerciaux. Et je souhaite vous donner quelques chiffres concernant l’AECG. L’an dernier, celui-ci a permis d’exporter 4,5 milliards d’euros de produits agroalimentaires vers le Canada, soit 53 % de plus qu’avant sa conclusion, ce qui représente une augmentation considérable. Et notre excédent agroalimentaire avec le Canada atteint 1,6 milliard d’euros. Nous devons donc continuer à œuvrer en faveur d’un commerce ouvert et équitable qui offre des perspectives à nos entreprises. Mais nous avons également besoin de conditions de concurrence équitables au niveau mondial et nous devons faire face aux risques que nous voyons associés à l’ouverture. Nous luttons déjà contre ces risques au moyen de nos mesures de défense commerciale. Nous avons pris plus de 170 mesures de défense commerciale qui ont protégé plus de 500 000 emplois dans l’Union européenne.

Permettez-moi de conclure en rappelant à tous que, malgré les défis, nous partons d’une base solide. Grâce à nos efforts unis, l’Union européenne a mieux résisté à la crise de la COVID-19 que n’importe quelle autre région. Et c’est grâce, bien entendu, à la clause dérogatoire générale, mais surtout au programme pour l’emploi SURE et au programme d’investissement NextGenerationEU. Le chômage est à un niveau historiquement bas, en dessous de 6 % en décembre dernier. Et l’emploi a atteint un niveau record, atteignant 75 % en 2023. L’inflation est revenue à un niveau de près de 2 %. Il nous faut donc, tous ensemble, consolider cette situation et la transformer en une croissance durable et à long terme.

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