Vers la remise en cause du transfert de production et du transfert de technologie en Chine ?
Nous constatons aujourd’hui à nos dépens, en temps de crise, une réalité décriée par de nombreuses voix non écoutées depuis longtemps, à savoir que des pans entiers de l’Économie fabriquent leurs produits en Chine au motif de la réduction des coûts au détriment de notre souveraineté et indépendance nationale. Que ce soit en matière de téléphonie mobile, avec Apple, ou encore en matière automobile, Renault ou même en matière de fabrication de produits pharmaceutiques, les exemples ne manquent pas.
Nous utilisons le fait que les coûts de production sont bien moins élevés en Chine que dans la plupart du reste du monde pour pouvoir réduire les coûts de nos entreprises et ainsi augmenter les bénéfices. Les entreprises ont ainsi pendant des décennies conservé le capital en occident et utilisé la force productive chinoise.
La Chine, qui est en réalité un empire millénaire avec une force de résilience énorme a appliqué les principes du confucianisme : « Celui qui sait obéir saura ensuite commander ».
Après avoir attiré les entreprises étrangères sur son territoire, la Chine a cherché à profiter pleinement de cette opportunité qui lui était offerte de rattraper son retard technologique, en imposant progressivement aux entreprises étrangères une forme de transfert forcé de leurs technologies.
La Chine, qui est sans doute le seul pays du monde capable de dresser des plans sur plusieurs dizaines d’années (cf. par exemple son programme ambitieux des nouvelles routes de la soie), avait décidé de passer de 50% de dépendance technologique en 2006 à moins de 30% d’ici la fin 2020. Et pour atteindre cet objectif, les entreprises locales se sont attachées à acquérir et absorber des technologies étrangères qui seraient utiles afin de pouvoir améliorer leurs propres capacités.
Toutefois, si cette transmission peut se pratiquer par le transfert de technologie « intentionnel », celui-ci étant tout à fait légitime, elle peut également se pratiquer par le transfert forcé de technologie.
La Chine a donc mise en place diverses politiques conduisant au transfert forcé des technologies, certaines étant plus efficaces que d’autres, car plus contraignantes pour les entreprises. Parmi les plus marquantes on retrouve par exemple l’obligation dans certains secteurs de transférer leur technologie sous peine de se voir opposer un refus d’accès au marché local.
Par exemple ; dans le secteur automobile, les constructeurs étrangers ont l’obligation de constituer avec des entreprises locales majoritaires des structures communes. Dès lors, les constructeurs automobiles se retrouvent contraints de devoir céder des technologies sensibles à des sociétés qu’elles ne contrôlent pas, notamment les codes propriétaires des logiciels, afin de pouvoir utiliser ces technologies pour construire leurs véhicules sur le sol chinois.
Ainsi, les entreprises occidentales ont pris le risque que les entreprises chinoises ne s’érigent un jour en leurs concurrents aussi bien en Chine que dans d’autres pays.
Les entreprises qui ont tenté de contester ces transferts devant les Tribunaux ont été déboutées, soit au motif de l’incompétence des Tribunaux Américains saisis, soit par la protection de principe des Tribunaux Chinois saisis. En effet, la Chine est gouvernée par le Parti qui conçoit et contrôle le fonctionnement de l’État et qui ne peut pas permettre la mise en place de tribunaux indépendants pouvant favoriser certains groupes d’intérêts, et notamment en matière de propriété intellectuelle.
Les entreprises et les Etats ont donc dû réagir à l’encontre de ces mesures. S’agissant des entreprises, celles-ci prennent diverses mesures afin de protéger leur propriété intellectuelle et donc leurs technologies. Celles-ci par exemple évitent de développer de nouvelles technologies avec leurs partenaires chinois, elles préfèrent réutiliser d’autres technologies plutôt que de créer une nouvelle technologie. Et ce toujours dans le but de pouvoir contrôler l’utilisation qui en est faite.
L’Europe et les Etats-Unis ont également cherché à agir, notamment en procédant à des demandes de consultations auprès de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC). Toutefois, ces demandes sont actuellement suspendues puisque la demande de consultations présentée par l’Europe n’a pas encore donné de suite et s’agissant de celle présentée par les Etats-Unis, cette dernière a déjà fait l’objet de l’établissement d’un groupe spécial dont les travaux sont suspendus jusqu’au 1er mai 2020. On constate donc une première limite aux instruments à la disposition des États pour lutter contre les mesures de la Chine. Les travaux étant toujours en cours, la Chine peut librement continuer d’appliquer ces mesures dans l’attente de la fin des procédures devant l’OMC. Cela ne paraît donc pas étonnant que les États-Unis aient quant à eux préféré recourir à d’autres moyens pour lutter contre ces politiques.
C’est dans ce contexte que les Etats-Unis ont fait le choix d’appliquer la section 301 du Trade Act de 1974 et d’imposer des sanctions économiques à la Chine. Le premier effet avec l’utilisation de la section 301 a été l’imposition de tarifs de 25 % sur certaines importations chinoises, visant certains produits spécifiques tels que ce qui touche à l’aéronautique, aux technologies de l’information et des communications. Deux premières listes de produits visés par ces mesures ont alors été publiées, la première visant 818 articles, ayant un impact sur un volume d’importations estimé à 34 milliards de dollars, la seconde liste portant visant 279 articles, ayant un impact sur un volume d’importation estimé à 16 milliards de dollars. En réponse à cela la Chine a déposé une demande de consultation à l’OMC pour violation du principe de la nation la plus favorisée, tel que posé par les règles de l’OMC.
La situation entre les Etats-Unis et la Chine sur ce point paraît donc être bloquée avec d’une part, la demande de consultations formulée par les Etats-Unis à l’encontre de la Chine et l’utilisation de la section 301 par les Etats-Unis, et d’autre part, une demande de consultations formulée par la Chine contre les Etats-Unis et l’absence de mesures significatives pour mettre fin au conflit. Car bien qu’aucune mesure significative n’ait été prise par la Chine afin de mettre fin à ce conflit, celle-ci a déjà pris diverses mesures pour atténuer le conflit. Il est possible de noter notamment la loi « Foreign Investment Law » qui a été adoptée le 15 mars 2019 par l’Assemblée populaire de Chine qui interdit, en son article 22, aux départements administratifs ou leurs équipes de forcer au transfert de technologies vis-à-vis des entreprises étrangères. Bien que cette mesure puisse sembler importante, il n’en demeure pas moins qu’elle ne semble pas être suffisante pour les Etats-Unis pour mettre fin au différend.
Il reste à savoir désormais comment la situation sera amenée à évoluer, notamment de savoir si le président américain Donald Trump envisagera de prendre de nouvelles mesures à l’encontre de la Chine, ou si celle-ci va modifier ses lois afin de protéger au mieux les droits de propriété intellectuelle des entreprises étrangères.
Toutefois l’issue de ce conflit semble aujourd’hui être plus incertaine avec la crise sanitaire de propagation du virus « Covid-19 » qui a contraint bon nombre d’entreprises présentes sur le sol chinois à fermer et qui a des conséquences directes sur les approvisionnements des entreprises occidentales.
En effet, la crise actuelle fait apparaître de manière évidente la désorganisation politique et industrielle des Etats occidentaux et la nécessité impérieuse pour chaque Nation de retrouver outre ses capacités de production, la maîtrise des technologies de pointe.
Avons-nous perdu jusqu’à la connaissance de la dialectique du Maître et de l’Esclave de Platon ?
Les événements actuels devront engendre une remise à plat du système économique et politique, au sein duquel la France, comme les autres nations occidentales, devra retrouver, développer et conserver la maîtrise des technologies de pointe, et pour se faire il sera indispensable de rapatrier en France des lignes de production.
Économiser des coûts de production pour permettre la connaissance des technologies modernes, indemniser des inactifs, acheter des biens étrangers, perdre toute indépendance politique et économique, être incapable de produire en urgence ne serait-ce que des masques, et ruiner son économie pour pallier aux crises venues de l’étranger ne peut plus et ne doit pas être le CREDO.
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