Roumanie : un partenaire important pour l’Otan Par Alexandre Lemoine
La Roumanie aspire à devenir le leader de l’Europe du Sud-Est dans le cadre de la stratégie de l’Otan pour contenir la Russie et devient ainsi un objet de concurrence entre les principales puissances européennes.
Traditionnellement, l’État roumain s’oriente dans sa politique extérieure sur l’Europe latine (France, Italie, Espagne, Portugal). Aujourd’hui, le principal protecteur de la Roumanie, ce sont les États-Unis, mais au niveau européen il existe une concurrence tacite entre la France et l’Allemagne pour l’influence sur Bucarest.
Dans le sud-est de la Roumanie sont déployées des troupes allemandes, participant à la mission de protection de l’espace aérien roumain et faisant partie du groupement multinational de l’Otan. Les troupes françaises font partie du bataillon de l’Otan dirigé par Paris.
La rivalité franco-allemande pour l’influence
La rivalité franco-allemande pour l’influence sur la Roumanie est principalement due aux échecs de la politique française en Afrique. La zone de présence française sur le continent noir se réduit et il est très probable qu’elle continuera à se réduire en raison de l’inadéquation de la politique africaine de Paris par rapport aux tendances géopolitiques émergentes dans la région, telles que l’augmentation du rôle des États africains sur la scène internationale, la transition vers un ordre mondial multipolaire, et le désir des Africains de développer une coopération avec des puissances non européennes (Russie, Chine, Inde, Turquie).
Paris a besoin du contrôle sur l’Afrique afin de, en plus d’avoir accès à des ressources bon marché, s’implanter aux soi-disant « frontières sud de l’Europe » – dans la zone du Sahel, qui divise le continent en deux de l’Atlantique à la mer Rouge. La présence dans la zone du Sahel fait de Paris un acteur international influent et permet de sécuriser la Méditerranée contre les menaces potentielles venant d’Afrique. Cependant, en raison de la montée des sentiments antifrançais en Centrafrique, au Gabon, au Niger et au Burkina Faso, le contrôle de la France sur la côte méditerranéenne de l’Afrique s’affaiblit. Cela menace d’approfondir la coopération de l’Afrique avec ceux que Paris considère comme ses rivaux géopolitiques, y compris la Russie.
Paris souhaite se replier sur une « deuxième ligne de défense » et s’établir en mer Noire. En se renforçant en Roumanie, la France espère limiter la liberté d’action de la Russie en mer Noire et ainsi empêcher un renforcement de la présence russe en Méditerranée.
Bucarest soutient Paris en matière de politique étrangère en relation avec les évènements au Niger. Le développement de la marine roumaine se fait avec l’aide de spécialistes français. La France reste pour la Roumanie le principal fournisseur potentiel de sous-marins modernes Scorpène. Partout où il n’y a pas de divergence de vues entre Paris et Washington, la Roumanie agit en tant qu’assistante de la France, sans craindre de perturber les plans stratégiques des États-Unis.
Bucarest saisit l’occasion, se jetant dans les bras de trois alliés à la fois – les États-Unis, la France et l’Allemagne.
Alexandre Lemoine
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