Philippe Dorthe : « L’état inquiétant de notre République est le résultat d’erreurs et de « laisser-faire » »
Les colporteurs des remèdes miracles à l’efficacité rapide ne sont que menteurs et escrocs de la politique. L’état inquiétant de notre République est le résultat d’erreurs et de « laisser-faire » qui ont emprunté le temps long. L’immédiateté ne trouvera pas de réponse pérenne. Déconstruire a pris du temps, reconstruire sur un nouveau modèle en prendra encore plus.
Avant d’élaborer un projet crédible, la gauche sérieuse, celle de Jaurès qui en s’adressant aux jeunes a défini en une phrase la social-démocratie : « Aller vers l’idéal en tenant compte du réel », doit s’entendre sur le constat alarmant de décennies de mesures inappropriées.
Il serait illusoire de penser que les émeutes de ces derniers jours déclenchés par la mort du jeune homme de Nanterre, ainsi que le mouvement des gilets jaunes, soient la résultante d’une seule cause pouvant être différente en fonction des positionnements politiques de chacun.
La perte de repères de la jeunesse, une société d’adultes estourbie par un monde globalisé, une vision économique à bout de souffle, un monde politique composé de femmes et d’hommes qui confondent de plus en plus parcours personnel et intérêt général, participent au délitement progressif d’une organisation sociale jusque-là bâtie sur les fondamentaux d’une République laïque aux valeurs omniprésentes à tous les âges de la vie.
En quelque sorte, tout se déroule comme si nous avions perdu le côté initiatique sur lequel depuis la nuit des temps les individus se construisent étape par étape. Le grand flou sociétal entretenu par le système débridé de toute régulation, notamment celle des réseaux sociaux, est déjà un élément fort qui aide à comprendre la déconstruction de la société et en particulier de la jeunesse.
La République Française n’est pas venue de nulle part comme une génération spontanée.
Il aura fallu des décennies de combats et de discussions démocratiques pour façonner notre organisation sociétale.
La pâte feuilletée, métaphore de la multi-causalité des troubles et symptômes de cette maladie sociétale, est pétrie depuis plus d’un demi-siècle.
Dans ce constat on peut évoquer l’urbanisme densifié mortifère, la métropolisation inhumaine, l’école et ses programmes déconnectés, les trafics générateurs de zones de non droit, l’islamisme radical sournois, la police de proximité supprimée, le renseignement défaillant, la défense nationale éloignée du citoyen, la mauvaise prise en compte du handicap psychique, l’éloignement de l’accès aux soins en zones rurales comme urbaines, l’abandon de la vie associative, la désindustrialisation du pays génératrice d’un chômage systémique, etc …
Autant de sujets oubliés ou mal traités par une technostructure plus formatée sur la théorie de la gestion au jour le jour que sur l’intérêt général. Cette technostructure très offensive depuis au moins quatre décennies s’est vue renforcée par des élus issus de ses rangs et depuis les années Macron mais aussi dans la mouvance de Mélenchon avec des parlementaires totalement hors sol propulsés par démagogie et populisme dans l’hémicycle comme dans le grand bain d’une piscine sans savoir nager.