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Paris doit renouer avec une politique culturelle ambitieuse et tournée vers sa jeunesse ! Par Pierre-Yves Bournazel

Nous héritons tous d’une histoire, d’un patrimoine, d’une architecture, d’œuvres et de musées exceptionnels qui ont fait et qui font de Paris la ville des arts et des artistes. Paris est la ville de la beauté, des amoureux de la vie et de la culture. C’est pour cela que les Parisiennes et les Parisiens aiment tant leur ville, que partout dans le monde on rêve de Paris, qu’elle continue d’inspirer les passions et les imaginaires. Je m’inscris dans les pas de toutes celles et de tous ceux qui, venus de leur province ou de plus loin encore, ont eu le privilège de découvrir la majesté de la cour du Louvre, de se joindre à la foule qui se presse devant l’impressionnisme à Orsay, de gravir le corset de métal de la Tour Eiffel, de se promener le long des avenues édifiées par le baron Haussmann et de se perdre dans les rues pavées de Montmartre avant de déboucher face à l’horizon immense qui se dégage devant la basilique du Sacré-Cœur.

C’est lorsque l’on marche dans Paris que l’on réalise combien cette ville est un musée à ciel ouvert autant qu’elle est un « être vivant » dont l’humeur varie selon les saisons et les heures.

Paris se nourrit de la grandeur de son héritage. Nous devons le chérir, l’entretenir et le transmettre. C’est l’un de nos devoirs.

Notre responsabilité est aussi de l’enrichir des talents de notre époque, que Paris continue de surprendre, de créer, d’émerveiller par son audace. Cette responsabilité est collective. La Ville de Paris la partage avec l’Etat, les collectivités du Grand Paris, les associations culturelles, les professeurs de musique, de chant, de danse, de théâtre, de peinture, de photographie, de sculpture, avec nos écoles d’art et de cinéma qui sont parmi les plus prestigieuses, et les professionnels de ce secteur économique. Le rôle du politique est de contribuer à créer les conditions de cette alchimie créative dans notre ville.

L’essentiel est de donner à chacun les moyens d’être actif devant une œuvre d’art, de donner le goût de la découverte et de pouvoir s’enthousiasmer devant la beauté.

« La littérature, comme toute forme d’art, est la preuve que la vie ne suffit pas ». Cette citation du poète Fernando Pessoa exprime si bien ce besoin universel d’accéder à d’autres mondes, de s’ouvrir à de nouveaux horizons que l’on ne soupçonnait pas, de s’affranchir de son quotidien et de nourrir des rêves sans limites.

À mon sens, l’une des premières missions de la Ville de Paris en tant que collectivité est de faire entrer la culture dans la vie de chacun, dans la vie quotidienne, dans la ville au quotidien.

Aujourd’hui, je considère que la Ville de Paris ne s’est pas suffisamment adaptée pour s’accorder à la diversité des aspirations des Parisiennes et des Parisiens, notamment des plus jeunes.

Il est essentiel de donner l’opportunité à chaque enfant de rencontrer tous ces possibles. C’est pourquoi, depuis de nombreuses années, je mets dans le débat public des propositions concrètes afin que les jeunes Parisiennes et Parisiens puissent bénéficier d’un véritable saut qualitatif en matière d’éveil à la culture. Cette mission de culture de proximité est capitale parce qu’elle participe de l’égalité des chances. Elle est très concrète : elle se joue dans les bibliothèques, dans les conservatoires et dans les écoles. À ce titre, la Ville doit être porteuse d’une plus grande ambition.

L’élaboration d’un grand plan d’ouverture des bibliothèques en soirée et le week-end, comme le préconise le rapport d’Erik Orsenna et de Noël Corbin est un enjeu décisif. Nous devons rattraper notre retard face aux « autres « villes-mondes ». À Paris, les bibliothèques sont ouvertes en moyenne 38 heures/semaine, contre 78 heures à Londres, 88 heures à New-York ou 98 heures à Copenhague. Dans une ville où la taille des logements est particulièrement contrainte par le niveau très élevé des loyers, il y a un réel besoin de proposer un lieu apaisé de lecture et de travail pour tous ceux qui n’ont pas le loisir d’en disposer à domicile. Ouvrir les bibliothèques le dimanche et en soirée, ce n’est pas qu’une simple question de confort ou de modernité, c’est un enjeu d’égalité des chances.  Les bibliothèques doivent également devenir des lieux de services et de solidarité, comme cela peut être le cas aux Pays-Bas ou au Danemark. Pourquoi, par exemple, ne pas imaginer qu’elles proposent davantage de servies pour toutes sortes de démarches administratives dans une action d’inclusion sociale ? Elles pourraient aussi être un lieu qui facilite la recherche d’emploi, l’initiative économique et la convivialité. Elles pourraient également devenir des lieux privilégiés pour contribuer à la réussite éducative des jeunes en offrant des espaces et des services d’aide aux devoirs.

La Ville doit également revoir sa politique de gestion des conservatoires pour en ouvrir davantage, pour mettre fin à l’inscription par tirage au sort qui est le plus injuste des systèmes. À Paris les conservatoires sont pleins. C’est le signe incontestable d’un désir d’apprendre et de transmettre le goût de la musique, du chant, de la danse ou du théâtre. Il faut se féliciter de cette ambition des Parisiennes et des Parisiens. La Ville doit s’y adapter et la prendre en compte. Construisons des nouveaux conservatoires, ouvrons-les davantage dans le cadre des ateliers périscolaires, mettons plus facilement les salles de répétition à disposition des groupes d’amateurs et des associations le soir, le dimanche et pendant les vacances scolaires, généralisons les cours collectifs ouverts à la libre pratique des élèves et aux groupes amateurs constitués. 

Il est enfin indispensable de renforcer la dimension culturelle des activités périscolaires avec des intervenants formés à cela et tisser des liens plus étroits avec les professionnels du monde de la culture. C’est là une des conditions indispensables pour réaliser un saut qualitatif dans l’intérêt des petites Parisiennes et des petits Parisiens.

Ces propositions concrètes doivent bien entendu s’inscrire dans une réflexion plus large qui doit être l’occasion de repenser les fondamentaux de la politique culturelle de la Ville pour s’accorder avec la diversité des aspirations des Parisiennes et des Parisiens et l’opportunité de soutenir avec une autre énergie la pratique d’une activité culturelle par tous ainsi que les artistes qui créent et innovent.

Ces propositions ont également pour objectif de défendre une certaine idée de Paris en portant le projet d’une ville à échelle humaine, centrée sur la qualité de vie et la multiplication d’espaces culturels, de partage et de création, où s’éveillent et s’épanouissent les imaginaires. Un ensemble de lieux de vies, qui favorisent le lien social et la mixité.

Il serait heureux que la Ville de Paris prenne aujourd’hui davantage d’initiatives afin d’être au rendez-vous de cet engagement en faveur de la culture et de la diversité de la création.

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