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Gabon : le général Oligui donne des gages à Paris

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Le jour même de sa prise de pouvoir, Brice Clotaire Oligui Nguema a tenu à expliquer sa stratégie aux autorités françaises. Le président de transition prétend vouloir renforcer la relation avec Paris.

Entre gestion de sa prise de pouvoir et diplomatie, le général Brice Clotaire Oligui Nguema cherche un équilibre. Dès le 30 août, quelques heures après avoir renversé son cousin et président, Ali Bongo, le désormais président de transition a tenu à expliquer sa démarche au partenaire français. Selon les informations d’Africa Intelligence, le général Oligui Nguema s’est entretenu avec l’ambassadeur de France à Libreville, Alexis Lamek, et le chef de poste de la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE).

Il a garanti l’intégrité physique d’Ali Bongo et son attachement au statut d’ancien président. A ses interlocuteurs français, il a tenu à assurer que la situation en cours au Gabon n’avait rien à voir avec le putsch mené le 26 juillet par le général Abdourrahmane Tchiani au Niger. Il n’a toutefois pas précisé la durée de la « transition » envisagée.

Pragmatisme de Paris

Il a insisté sur sa volonté de poursuivre le partenariat avec Paris en rappelant que c’est le président déchu qui a, peu à peu, tourné le dos à la France en rejoignant le Commonwealth. Le général Oligui Nguema a aussi souligné que son prédécesseur avait renforcé de manière significative les liens économiques et sécuritaires avec la Chine, devenue le premier partenaire commercial du Gabon, de même qu’avec l’Inde et Singapour.

A Paris, le président Emmanuel Macron a convoqué un conseil de défense jeudi 31 août tout particulièrement consacré au Gabon. La situation à Libreville y a été appréhendée de manière pragmatique et sans hostilité diplomatique à l’égard du putsch. Au regard de la relation qui s’était distendue avec Ali Bongo, Paris estime avoir eu les garanties économiques et sécuritaires nécessaires quant à ses intérêts dans le pays pour ne pas rompre sa coopération.

Le jour même, la société française Eramet a d’ailleurs repris ses activités d’extraction de manganèse dans la mine de Moanda. Sur le plan de l’influence médiatique française, les signaux de RFI et France 24, interrompus depuis le jour du scrutin du 26 août, ont été rétablis.

Continuité dans les « services »

Les services français ont également apprécié que leurs homologues gabonais soient pour la plupart maintenus en fonction. Les caciques du renseignement ont ainsi basculé sans difficulté du côté du général Oligui Nguema. Le puissant centre d’interception et d’écoute de la présidence gabonaise, Silam, mis en place par la France du temps d’Omar Bongo dans les années 1980, n’a pas cessé son activité. Son responsable français, Jean-Charles Solon, n’a aucunement été inquiété et son retour en France, initialement prévu après ces élections, est retardé afin d’assurer une continuité.

Néanmoins, la situation d’une poignée de personnalités appréhendées par la junte pourrait placer Paris dans une situation inconfortable. En effet, plusieurs d’entre elles disposent de la double nationalité, gabonaise et française, et ont d’ores et déjà indiqué souhaiter vouloir bénéficier de la protection consulaire de Paris. Dans le même temps, les avocats de l’épouse d’Ali Bongo, Sylvia Bongo, ont annoncé le 1er septembre avoir porté plainte en France pour « détention arbitraire ». La désormais ex-première dame gabonaise fait partie des personnalités visées qui disposent de la double nationalité.

Le lobbying parisien anti-Oligui de Frédéric Bongo

L’ancien chef de la Direction générale des services spéciaux (DGSS), Frédéric Bongo, demi-frère d’Ali Bongo, reste fermement hostile à la prise de pouvoir du général Oligui Nguema. En séjour en Guadeloupe avec le judoka français Teddy Riner, Frédéric Bongo a rallié Paris en urgence au lendemain du coup. Il a tenté de faire passer le message aux autorités françaises des risques de déstabilisation et prédit un putsch dans le putsch. Il a activé son réseau parmi les généraux, avec qui il est resté en contact. Sa relation avec le général Oligui Nguema restait particulièrement distendue depuis que ce dernier l’avait remplacé en 2019 à la tête de la DGSS, les services de renseignement de la puissante Garde républicaine. Frédéric Bongo lui attribuant un rôle dans sa disgrâce qui l’a tenu ces dernières années à l’écart du cœur du système Bongo.4

Transition :

*1er Ministre

Le président de la transition au Gabon, le général Brice Oligui Nguema, a nommé jeudi 7 septembre Premier ministre de transition Raymond Ndong Sima, un économiste et virulent opposant au président Ali Bongo renversé par les militaires il y a une semaine, selon un décret lu à la télévision d’État.

Raymond Ndong Sima, 68 ans, avait été Premier ministre d’Ali Bongo de 2012 à 2014 mais s’était éloigné du pouvoir, qu’il accusait régulièrement de mauvaise gouvernance jusqu’à se présenter contre le chef de l’État aux présidentielles de 2016 et 2023. Pour cette dernière, il s’était désisté au dernier moment au profit d’un candidat commun aux principaux mouvements et partis de l’opposition.

Natif de la province du Woleu-Ntem, berceau de l’ethnie fang majoritaire au Gabon et l’un des fiefs historiques de l’opposition à la famille Bongo, Raymond Ndong Sima est notamment diplômé d’économétrie de l’université Paris-Dauphine de Paris.

*Gouvernement de transition

Le général Oligui Nguema, qui a mené le coup d’État du 30 août contre un Ali Bongo à peine proclamé réélu dans une élection « frauduleuse », selon les militaires, a prêté serment lundi en tant que président d’une période de transition dont il n’a pas fixé la durée, et au terme de laquelle il a promis des « élections libres ».

Lundi, il avait aussi annoncé la formation d’un gouvernement de transition comprenant des personnalités de tous bords politiques. Puis une nouvelle Constitution élaborée avec les représentants de « toutes les forces vives de la Nation », qui sera soumise à référendum, et « plus respectueuse de la démocratie et des droits humains ».

Quelques minutes après l’annonce de sa nomination, Raymond Ndong Sima a dit à l’AFP espérer soumettre au général Oligui Nguema « d’ici trois à quatre jours une proposition » de gouvernement de transition.

*Toutes les familles politiques

« On m’a remis une feuille de route, et je vais essayer de travailler dans le sens de ce que les militaires ont décidé » pour « qu’on remette en ordre l’ensemble des institutions et notamment tout ce qui concerne le cadre des élections », a-t-il expliqué par téléphone. « Je veux consulter largement » et « sans précipitation » pour « faire en sorte que les gens appartenant à toutes les familles politiques se retrouvent » dans le gouvernement, a-t-il conclu.

*Ali Bongo

Le général Oligui Nguema a annoncé qu’Ali Bongo, jusqu’alors en résidence surveillée à Libreville, « était libre de ses mouvements » et, « compte tenu de son état de santé », de « se rendre à l’étranger » pour des contrôles médicaux. Le chef de l’État déchu a subi un grave AVC en 2018 dont il garde des séquelles physiques.

Le coup d’État a été mené sans effusion de sang, par des militaires unis derrière le général Oligui Nguema et les chefs de tous les corps de l’armée et de la police. Les putschistes avaient rapidement suscité le ralliement de la quasi-totalité des partis de l’ancienne opposition, et d’une partie de l’ex-majorité, ainsi qu’un élan massif d’une population les remerciant de l’avoir « libérée » de 55 ans de « dynastie Bongo » au pouvoir.

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