Crimes rituels au Gabon: le pouvoir en ligne de mire
Plusieurs centaines de morts ont été enregistrées au cours des quinze dernières années. L’élite politique gabonaise est pointée du doigt par une association de victimes.
La psychose autour des crimes rituels se ravive
En 2012, la chaîne de télévision française Canal + avait diffusé un reportage intitulé Les organes du pouvoir sur le phénomène des crimes rituels au Gabon. Dans ce document glaçant, un féticheur expliquait que la souffrance de la victime était un élément indispensable pour garantir l’efficacité du fétiche.
« Lorsqu’on vous coupe le clitoris vivant, qu’on vous coupe la langue vivante, vous criez. Et plus vous avez mal, plus vous vous dédoublez et plus vous serez utile », témoignait le féticheur tout en précisant que les organes humains sont très recommandés pour accéder au pouvoir. On y apprenait aussi que les organes humains « les plus prisés » pour le pouvoir étaient le cœur, pour « rassembler les foules », la langue pour « s’exprimer facilement », et les organes génitaux « qui apportent la vitalité ».
La diffusion de ce reportage avait provoqué un électrochoc au Gabon. Mais les assassinats n’avaient pas cessé pour autant. En 2013, l’Association de lutte contre les crimes rituels s’était émue de la découverte de corps de jeunes filles démembrées sur les plages gabonaises. Jean Elvis Ebang dénonce un manque de volonté politique pour éradiquer ce fléau.
« Il y a eu des condamnations de certains bourreaux, mais les commanditaires n’ont jamais été inquiétés et l’impunité persiste. Ce sont de hautes personnalités qui paralysent la machine à cause de leurs croyances. Ils veulent se maintenir au pouvoir et accéder à la richesse à tout prix », accuse-t-il.
Faut-il avoir peur ?
Au Gabon depuis plusieurs semaines, entre disparitions signalées, signalisations de voitures conduites par de supposés criminels, témoignages troublants et corps sans vie retrouvés avec des organes manquants, en cette année électorale la psychose autour des crimes rituels se ravive.
Dans le Grand-Libreville, la crainte gagne le terrain au point que le moindre geste déplacé d’un chauffeur fait craindre le pire. Les ‘légendes urbaines’ racontent qu’en pareilles périodes, «les hommes politiques assoiffés de sang, sont prêts à tout pour remporter des victoires». Leurs hommes à tout faire sillonneraient donc villes et villages pour s’emparer des éventuelles proies. Mythe ou réalité ? S’il est impossible de répondre en toute logique faute d’enquête ou d’autopsie quand c’est nécessaire, le peuple répond de façon empirique que ces histoires n’ont rien d’un mythe. Faut-il avoir peur ?