Coût d’emprunt de la France : démystifier l’effet Le Pen par Christopher Dembik
L’écart de taux de rendement continue de s’accroître entre les obligations françaises et allemandes et atteint désormais 80 points de base, soit le plus haut niveau depuis novembre 2012. Il y a encore quelques mois de cela, il n’était que de 20 points de base.
Au regard des élections intermédiaires qui ont eu lieu ces dernières années, notamment les cantonales et les régionales, on constate une volonté des électeurs d’adopter le comportement le plus adéquat pour éviter la victoire de candidats ou de listes du Front National. Dans ces circonstances, il est très peu probable que Marine Le Pen puisse bénéficier d’un report de voix suffisant pour franchir le seuil de 50% au second tour en 2017.
En outre, il y a trois autres dynamiques plus importantes sur le moyen terme qui sont à prendre en compte et valident l’hypothèse d’une hausse durable du taux d’emprunt de la France :
– Le retour de l’inflation au niveau mondial lié à la hausse du cours des matières premières (+9% en janvier 2017 sur un an) et surtout à la sortie de la Chine de la déflation depuis septembre 2016 ;
– Le différentiel de performance économique entre la France et l’Allemagne. En ce sens, l’accroissement du spread de la France peut être considéré comme un retour à la normale ;
– Une plus grande sélectivité des investisseurs étrangers qui n’est pas uniquement liée à la perspective de l’élection présidentielle en France. Ainsi, depuis novembre 2016, les investisseurs japonais ont massivement reporté leurs achats sur les emprunts d’Etat à long terme émis par l’Allemagne alors qu’ils avaient privilégié plutôt les emprunts d’Etat français sur la période allant de janvier à octobre 2016.
Conséquence pour le prochain gouvernement : la prévision de taux d’emprunt à 0,9% du budget est certainement trop optimiste, ce qui va nécessiter une loi de finance rectificative après les élections législatives afin de respecter les engagements en termes de déficit de la France auprès de l’Union Européenne.
Levier d’action possible pour réduire les dépenses : accentuer la baisse des dotations aux collectivités locales et favoriser les économies d’échelle, en particulier via les communautés de communes et les communes nouvelles.