Ce que nous a apporté et continue de nous apporter l’Europe
L’Europe, on peut critiquer son action, ou son organisation (sur laquelle s’est penchée la Fondation iFRAP dans une étude à paraître) mais elle reste une institution dont nous avons besoin : trouver que cette institution est en panne, être en désaccord sur son bilan actuel, sur son action future, ce n’est pas mettre en cause son existence. Les Français d’ailleurs sont en majorité favorables à l’Europe, c’est-à-dire à ce qu’elle existe, même s’ils sont divisés sur la façon de la faire évoluer. Nous avons voulu dans cette note revenir sur les avancées qui ont été permises par L’Europe en matière de libre circulation, de réglementation, de Droits de l’Homme ou encore de libéralisation des services publics…
Qu’on lui doive la paix et la stabilité, ainsi que sa force de référence internationale, qui est un enjeu capital, sont des vérités ressassées, qui n’en demeurent pas moins des vérités. De même pour l’organisation du marché intérieur, maintenant achevée, avec la liberté de circulation des hommes, des biens, services et capitaux, et qui a été un gage de prospérité qu’on le veuille ou non (l’espace Schengen, tant critiqué à l’heure actuelle, n’est pas à l’origine une construction européenne, et n’a été intégré à l’Europe que par la volonté des États membres en 1997). La réglementation de la concurrence (ententes et positions dominantes) a incontestablement constitué un grand progrès en empêchant la mainmise de grands groupes prédateurs sur les différents marchés : mais il est toujours difficile d’imaginer ce qu’aurait été la situation si l’histoire avait été différente, ce qui laisse la porte ouverte à toutes les critiques, et surtout, celles de mauvaise foi.
Rappelons-nous aussi que toute la réglementation de la concurrence interne française, s’appliquant en dehors de la mise en jeu de la réglementation européenne (qui suppose l’existence d’effets sur le commerce entre États membres, ce qui n’arrive pas tous les jours), est identique à cette dernière et continuerait à s’appliquer même si l’Europe n’existait plus. Rappelons encore les apports de la Cour Européenne des Droits de l’Homme, dont les décisions se sont souvent imposées en France, ou la grande préoccupation de l’Europe dans le domaine de l’environnement, et spécialement de la pollution, qui est à la base de règles que les différents pays, la France en premier, n’auraient pas adoptées de leur propre chef. Ce sont autant de bienfaits de l’Europe.
En matière de services publics, il est nécessaire de faire un petit retour en arrière sur les relations France – UE sur le sujet : à la fin des années 80, l’Europe s’attaque à la libéralisation des services. La France se protège, et réplique aussitôt en contestant le pouvoir d’initiative de la Commission européenne. Elle perd son procès devant la Cour de justice de la Communauté en 1991, mais traîne les pieds pour s’aligner, avant de revenir à la charge en 2002.
Cette fois, elle attaque, en demandant l’inscription dans le traité d’une dérogation aux règles de la concurrence pour les services publics. La majorité du Conseil de l’Europe lui donne tort. Isolée, mais acharnée, la France arrache finalement une déclaration de principe sur l’importance des services d’intérêt économique général parmi les valeurs de l’Union, petit lot de consolation sans portée pratique. La délégation sénatoriale pour l’Union européenne, sous la présidence du sénateur Haenel, note dans un rapport en 2000 que « le sujet des services publics […] est encore loin d’être consensuel en Europe ». En clair, il semble impossible de mettre tout le monde d’accord.