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Brésil : Où en sont les droits des peuples indigènes ?

Du 7 au 14 juillet 2023, s’est déroulé l’« Aldeia Multietnica », où « village multi-ethnique » en français. Ce rassemblement regroupant des peuples indigènes venus de tout le pays a lieu chaque année dans la Chapada dos Veadeiros, au centre du Brésil.

Aldeia Multietnica – Rassemblement multiethnique dédié aux luttes indigènes

Aldeia Multiétnica est un territoire de la Chapada dos Veadeiros dédié au renforcement des cultures et des luttes politiques des peuples indigènes, avec des valeurs de préservation, de promotion et d’accès au patrimoine matériel et immatériel brésilien. La Chapada dos Veadeiros est inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 2001. Considéré comme la savane comportant le plus de biodiversité du monde, elle constitue le cœur de la réserve de la biosphère de la région de Goias.

Lancé en 2007, cet évènement est devenu un point de rencontre entre différents peuples indigènes et est entré dans le calendrier annuel de nombreux de leurs représentants, tels que Avá Canoeiro, Krahô ou Fulni-ô. Il s’agit d’une occasion pour eux de se réunir et de présenter leurs connaissances, leurs façons de faire, leurs usages et leurs coutumes (chants, danses, gastronomie, peintures corporelles, art). Ils échangent autour de leurs droits originaux et tentent de trouver des solutions pour maintenir leurs cultures et territoires traditionnels. Aldeia Multietnica est également un bon moyen pour ses peuples de discuter avec des autochtones et des non-autochtones des thèmes concernant la réalité des villages.

Cette année, sept maisons indigènes traditionnelles étaient construites dans le village, par des représentants des diverses tribus présentes. Depuis 2019, la Xapono, une maison traditionnelle Yanomami, est la maison indigène construite au centre de ce village, devenant ainsi un lieu d’échanges et de rencontres entre tous les groupes ethniques.

La problématique de l’éducation

Pendant l’Aldeia Multietnica, de nombreuses conférences étaient organisées par des représentants des différentes tribus. Plusieurs d’entre eux ont évoqué les problématiques liées à l’éducation. Ils prônent une éducation libre, différente des programmes scolaires classiques.

Selon une représentante de la tribu Guarani Mbyá – du groupe ethnolinguistique tupi-guarani – le gouvernement devrait laisser les peuples indigènes faire l’école à leur manière avec leur façon de penser et leurs cultures ancestrales. Bien que cela soit prévu par la Constitution brésilienne de 1988, ce n’est pas mis en pratique, notamment dans l’État de Sao Paulo.

Pour les représentants présents, il est nécessaire d’avoir des écoles indigènes afin de pouvoir transmettre l’histoire et les savoirs ancestraux.

Pour un membre de la tribu Yawalapiti, il est fondamental « d’écouter les signes de la nature ». Il donne l’exemple de la ville, où il y a des signes. « Lorsque le feu tricolore est vert, tu peux passer. Ceci est un signal. » Il ajoute qu’il y a également des signes très important dans la nature, qu’il faut savoir décoder « quand les fourmis passent très vite à tel endroit, il va pleuvoir ». Il a conclu en déclarant qu’il était « important de transmettre ces savoirs, les signes de la forêt ».

Une représentante de la tribu Alto Xingu s’est exprimée au sujet de la géographie. Selon elle, la géographie que l’on apprend dans les livres scolaires, n’est pas la même que celle des peuples indigènes. Elle donne l’exemple de l’État du Paraná, frontalier au Paraguay et à l’Argentine « Qui a décidé que de ce côté de la rivière ce serait le Brésil et que de l’autre ce serait le Paraguay ? Ce sont les colons. Avant que le Brésil ne soit le Brésil, il y avait des populations qui vivaient là. Nous y sommes toujours aujourd’hui. Il est nécessaire que nos enfants comprennent leur histoire et géographie, indépendamment de celles des colons ».

La survie des peuples autochtones et de l’environnement en danger ?

Le 30 mai, une proposition de loi limitant fortement les terres des peuples autochtones a été approuvé par les députés brésiliens. Au total, le Brésil compte 764 territoires de peuples indigènes. Selon les chiffres de la Fondation nationale des peuples indigènes (FUNAI), environ un tiers d’entre eux n’ont pas encore été homologués.

« Il s’agit d’un génocide approuvé par la Chambre des députés. Il nous prive de notre droit de vivre, il met fin à l’avenir de nos enfants, des peuples indigènes et des forêts », a déploré la cheffe du mouvement des femmes indigènes du Xingu, Watatakalu Yawalapiti.

La chambre basse brésilienne, dominée par le Parti libéral de Jair Bolsonaro, a approuvé une proposition de loi limitant la démarcation des terres indigènes. Un revers pour l’actuel chef de l’État, Lula, qui avait relancé la politique de protection de l’Amazonie et des peuples autochtones.

Ce texte, qui doit encore être soumis au Sénat et au Tribunal Suprême Fédéral (TSF), établit que les autochtones n’ont droit qu’aux terres qu’ils occupaient au moment de la promulgation de la Constitution brésilienne de 1988.

Ce « cadre temporel » est dénoncé par les autochtones qui arguent qu’ils n’occupaient pas certaines terres en 1988 car ils en avaient été chassés au fil des siècles, notamment lors de la dictature militaire (1964-1985).

Le gouvernement de Lula s’est engagé à faire de la préservation de l’environnement une priorité, après le mandat de Jair Bolsonaro, marqué par une forte hausse de la déforestation.

En avril, le gouvernement brésilien a reconnu six nouveaux territoires, les premiers depuis cinq ans.

« Tuer les droits des indigènes, c’est aussi tuer la vie de la planète, car nous prenons soin des forêts », a argumenté Watatakalu Yawalapiti. Alors que le monde cherche à limiter le réchauffement climatique, la délimitation des terres indigènes est un obstacle majeur pour lutter contre la déforestation en Amazonie.

Maya Soulaire

Comments

  • Amespil
    juillet 20, 2023

    Tres bel article, continuez comme ca

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