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Adoption de la motion de rejet préalable : analyses des conséquences par Mélody Mock-Gruet

La motion de rejet sur le projet de loi immigration vient d’être adoptée 

·      Sur 548 votants, 

·      535 nombre de suffrages exprimés

·      Majorité absolue : 268

·      270 ont voté pour. 265 ont voté contre. 

La motion est donc passée à 2 voix près. Il y a donc bien eu une alliance de circonstances entre les groupes politiques d’opposition pour rejeter le texte avant son examen.

Chez les LR : 40 ont voté pour la motion, 11 se sont abstenus, 2 ont voté contre et 9 n’étaient pas présents.

Ainsi l’examen est immédiatement interrompu.

C’est la première fois qu’un texte d’une telle portée politique est rejetée par cette procédure.

Dans le cas du projet de loi immigration, il est prévu une procédure accélérée (procédure engagée le 1er février 2023). Ainsi, une commission mixte paritaire (CMP) pourra être convoquée. Mais le Gouvernement peut aussi retirer l’urgence et continuer l’étude du texte.

Plusieurs possibilités :

–       Le Gouvernement pourrait abandonner et ne pas réinscrire son texte. Mais cela serait marquer d’autant plus son échec. 

–       La reprise de la navette au Sénat. Comme c’est le texte du Sénat, le Sénat ne toucherait pas nécessairement à son texte… Et il faudrait repartir à l’Assemblée nationale, avec la possibilité d’une nouvelle motion de rejet.

–       La convocation d’une Commission Mixte Paritaire : 

Ø  La CMP serait convoquée sur la base du texte réécrit par le Sénat, sans prise en compte du travail fait par les députés en commission des lois. 

Ø  Concernant la CMP, plusieurs inconnus. Le résultat de la CMP conclusive ou non, contenu du texte ou non, dépendra de la composition de la CMP (pour 7 places à l’Assemblée nationale, il y a 4 places pour la majorité et 3 pour l’opposition. Mais comme il y a 10 groupes, il y a un tourniquet entre les groupes). La CMP pourrait adopter un texte proche de celui du Sénat.

Ø  Il restera alors plusieurs possibilités pour le Gouvernement de reprendre la main :

·      Si la CMP est conclusive : aucun amendement n’est recevable sauf accord du gouvernement et il y a également un principe d’entonnoir. Le Gouvernement pourrait alors activer l’article 49 al.3 pour réécrire le texte, ou mobiliser sa majorité pour qu’elle vote contre le texte qui n’a plus le contenu souhaité par le Gouvernement. A ce moment-là, le texte pourrait repartir une navette, ou le Gouvernement pourrait décider de ne pas réinscrire son texte…

·      Si la CMP échoue, nouvelle navette mais également la possibilité qu’à nouveau une motion de rejet préalable soit adoptée à l’Assemblée nationale. Ainsi reviendrait à nouveau la question de l’utilisation de l’article 49 al.3 (sachant que le Gouvernement ne peut l’utiliser que sur un seul texte par session, hors PLF et PLFSS).

Conclusion :

Mais dans tous les cas, cette motion de rejet préalable étant adoptée, elle créée un précédent que les différents groupes d’opposition risquent d’utiliser à répétition. En outre, cet outil est bien plus efficace que la motion de censure pour les députés, puisqu’il permet de remettre en cause un texte et non de faire tomber le Gouvernement. De plus, cet instrument fragilise la politique gouvernementale dans son ensemble et le rapport de force Gouvernement / assemblee-nationale.fr. Ainsi se pose la question de peut-être un futur Remaniement ?

Mélody Mock-Gruet

Docteur en droit public 

Enseignante à Sciences Po Paris 

Co-auteure du Petit Guide du Contrôle Parlementaire (éditions L’Harmattan, octobre 2023)

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