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« Tous les services dont on pense couramment qu’ils relèvent nécessairement de l’État peuvent être fournis bien plus efficacement et bien plus moralement par des acteurs privés. » - Murray Rothbard « Tout comme le marché peut déterminer les prix des biens, il peut déterminer les coûts des maux. Il suffit pour cela de laisser les services de justice être offerts de manière privée et concurrentielle. » - Jérémie Rostan

A-t-on besoin de l’état pour rendre la justice ?

La justice est considérée comme un des attributs régaliens de l’état. En tant que monopole de la contrainte légale, il semble le seul à même d’en garantir l’impartialité. Mais cette vision des choses est-elle la seule possible, la seule efficace ? La justice étatique est-elle, peut-elle être une justice… juste ? Au-delà, qu’en est-il de la justice privée, concept cher aux libertariens ?
La justice a deux rôles essentiels : régler les conflits et assurer l’indemnisation équitable de la partie lésée. Les libertariens pensent qu’il doit être permis à deux personnes de choisir devant qui elles veulent porter leurs différends, à la condition que ceux-ci soit prévus avant la survenance d’un litige. Cela implique aussi le droit de choisir à l’avance quelles règles seront appliquées pour les trancher.
La justice privée n’a rien de la vengeance, de la loi de la jungle ni du lynchage sauvage des coupables. La justice privée rend possible pour deux individus consentants de porter leur litige devant un tiers dont tous deux reconnaissent l’autorité, la compétence. C’est fréquent dans le monde des affaires, avec le recours à l’arbitrage, où au lieu de saisir un juge, les parties en litige s’en remettent librement à des arbitres mutuellement reconnus et choisis à l’avance. Ce système rencontre un vrai succès là où il est autorisé, car il fonctionne et parce que les parties y trouvent toutes deux un intérêt équilibré.
On oppose souvent l’argument voulant que des arbitres privés payés par les parties ne peuvent pas être impartiaux, ce qui rendrait invalide le concept même de justice privée.
Dans la réalité, un arbitre professionnel privé n’est pas assuré d’être choisi par ceux qui seront ses clients, ni d’être accepté par l’autre partie. Il doit donc au quotidien faire la preuve de sa pertinence et de son impartialité dans les décisions qu’il prend s’il veut espérer être sollicité. Qui accepterait de confier un dossier d’arbitrage à un individu notoirement corruptible ? Le besoin d’image est la clé.
De plus, l’arbitre privé encourt une responsabilité personnelle, au contraire d’un juge étatique. En cas de faute de sa part, il doit réparer le dommage causé à la victime de ses erreurs.
D’autres avancent que dans un tel système, tout le monde pourrait choisir sa propre loi, ce qui mènerait au chaos juridique et judiciaire. Or il ne s’agit pas de choisir sa loi au hasard pour se donner un avantage injustifié, le riche abusant ainsi du faible. Il s’agit de pouvoir se mettre d’accord sur celle qu’on veut se voir appliquer. Comme pour tout contrat de la vie courante.
Cela suppose un accord préalable entre les parties. Si une entreprise française et une entreprise américaine contractent, elles ont le choix de la loi à laquelle elles conviennent de soumettre leur contrat, c’est un des éléments de la négociation. Si deux individus librement consentants choisissent une règle donnée pour trancher leurs différends futurs, cela est bien au cœur de leur liberté.
Bien sûr, on ne peut pas à chaque acte de la vie de tous les jours négocier avec tout le monde pour choisir un arbitre si jamais un problème survenait, c’est juste impraticable concrètement. De plus, tout le monde n’est évidemment pas juriste. Dans la vraie vie, il nous suffira de souscrire une « assurance » et ce sera notre assureur qui discutera modalités avec l’assureur de la partie adverse.
Pour plus de simplicité, les assureurs représenteraient leurs adhérents aussi bien en demande qu’en défense, et négocieraient entre eux le ou les arbitres à désigner en cas de litiges. Ceci dit, il est très possible que des solutions différentes émergent. Perte de souveraineté envers les assureurs ? Non point, car ils seront eux-mêmes soumis à la pression de la concurrence et obligés de nous servir.
L’assurance personnelle n’est qu’une des options. Pour les moins fortunés, on peut envisager de multiples autres solutions, comme des assurances de groupe, à l’échelle d’une communauté donnée, ou encore l’intervention de groupes à visées philanthropiques (associations) ou encore des arbitres assurant une partie de leur service bénévolement… Quoi qu’il en soit ce système demeure plus accessible que le système actuel, procédurier et complexe, où dans les faits l’aide publique aux plus démunis ne leur permet pas d’avoir une assistance efficace et l’accès aux meilleurs professionnels.
Citations
« La privatisation des tribunaux civils est tout à fait concevable et réaliste. Il existe présentement aux États-Unis des milliers d’arbitres privés auxquels les parties à un contrat peuvent librement recourir pour régler un litige, et pareil recours est souvent prévu à l’avance dans les contrats. Devant l’inefficacité des tribunaux de l’État, observe Rothbard, les sociétés d’arbitrage privées sont florissantes. » — Pierre Lemieux
« Tous les services dont on pense couramment qu’ils relèvent nécessairement de l’État peuvent être fournis bien plus efficacement et bien plus moralement par des acteurs privés. » – Murray Rothbard
« Tout comme le marché peut déterminer les prix des biens, il peut déterminer les coûts des maux. Il suffit pour cela de laisser les services de justice être offerts de manière privée et concurrentielle. » – Jérémie Rostan
S. Geyres

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