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Stéphane SAINT-ANDRE : « La France doit valoriser ses voies d’eau »

 
UN PEU D’HISTOIRE
La France qui dispose du plus long réseau navigable d’Europe (8500 km) a tourné le dos à ses voies d’eau depuis trop longtemps.
Pourtant, notre pays s’est, bel et bien, développé autour de son extraordinaire réseau hydrographique naturel.
Dès le Moyen Âge sont instaurés des péages sur les fleuves et les rivières. Jusqu’au XVIIe siècle les grandes villes se développent autour du bassin fluvial qui commande l’économie.
La voie d’eau permet l’accès aux différentes façades maritimes. Elle permet aussi de relier ses bassins. C’est ainsi, par exemple, que naît le canal du midi permettant de joindre la Méditerranée à l’Atlantique.
Jusqu’au milieu du XIXe siècle la voie d’eau est le mode de transport privilégié des hommes. L’arrivée du rail et son expansion font réagir les tenants du transport fluvial. La canalisation est généralisée à toute la France.
Au début des années 30, le transport fluvial est à son apogée avec la création de ports fluviaux.
La seconde guerre mondiale marque un coup d’arrêt au transport fluvial et à la modernisation du réseau.
La France oublie ses voies d’eau jusque dans le milieu des années 90 où sous l’impulsion de Michel Rocard, alors premier ministre, l’institution Voies Navigables de France est créé. Les retards à rattraper sont importants et l’État continue à favoriser les investissements routiers et ferroviaires.
 
LE FLUVIAL UN OUTIL AU SERVICE DU DEVELOPPEMENT DURABLE
Le transport fluvial participe directement aux objectifs du Grenelle de l’environnement, à la lutte contre le changement climatique en diminuant, en particulier, de façon significative les émissions de CO2.
Le fluvial est un élément essentiel en matière de développement durable puisqu’il est une solution alternative par rapport au tout camion, avantageux en termes d’émissions de gaz à effet de serre de l’ordre de quatre à cinq fois inférieur à la route.
En France, le fleuve ne trouve sa place quand se combinant avec les autres modes de transport terrestre.
En France, le transport fluvial de marchandises représente moins de 3 % des tonne-kilomètres transportées contre 7 % en moyenne en Europe, 12 % en Belgique, 15 % en Allemagne et surtout 43 % en Hollande où l’utilisation des canaux est beaucoup plus fréquente.
Le manque d’entretien du réseau fluvial, et le manque de moyens accordés par l’Etat aux investissements ont continué de creuser l’écart avec nos voisins. Depuis la convention citoyenne sur le climat, les choses semblent évoluer. L’Etat prend enfin conscience de la nécessité d’investir massivement pour le développement de ce mode de transport vertueux. Ainsi, à la faveur du plan de relance, c’est 300 millions d’euros (soit le double des niveaux habituels) qui seront investis en 2021, par VNF.
A titre d’exemple, la réalisation du canal Seine Nord va permettre de repositionner la France et ses ports maritimes dans la chaîne logistique mondiale. Contrairement à une idée répandue, ce canal favorisera le retour du fret mondial principalement sur les ports du Havre et de Dunkerque (les grands ports de l’Europe du Nord étant aujourd’hui saturés). Sur ce canal pourront naviguer des convois fluviaux de 4400 tonnes soit l’équivalent de 220 camions par convoi.
 
LE ROLE DE VNF
VNF est un établissement public administratif de l’Etat, de 4700 collaborateurs, qui travaille principalement sur :
Les infrastructures/ouvrages : il exploite, entretient, modernise et développe le plus grand réseau fluvial européen (6700 kms de canaux, fleuves et rivières canalisées, plus de 3000 ouvrages d’art, 40 000 hectares de domaine public fluvial).
Le transport de marchandises : il développe le transport fluvial de fret en promouvant et favorisant le report modal et les logistiques multimodales.
Les échanges entre les acteurs économiques et institutionnels du fluvial (chargeurs, transporteurs, collectivités, prestataires fluviaux et maritimes…) au profit du développement du secteur.
Le tourisme/patrimoine fluvial : il préserve et valorise les équipements et lieux de vie de la voie d’eau pour accompagner le tourisme fluvial comme levier de développement économique local.
Le développement durable / eau : il optimise la gestion de l’eau dans une démarche écoresponsable et de préservation de la biodiversité.
Les infrastructures : il instruit et prépare les projets et nouvelles infrastructures fluviales.
VNF est aussi un outil au service du développement et de l’attractivité des territoires.  La responsabilité de l’entretien et de la valorisation de 6700 kilomètres de voies d’eau en fait un acteur majeur.
Le fluvial est la réalité quotidienne de nombreuses villes (2300 sont traversées par une voie d’eau), d’une quinzaine de régions et autant d’opportunités de développement.
De nombreux maires prennent conscience de l’opportunité de croissance et de développement que représente la rivière ou le fleuve pour leur territoire.
Naturellement, les enjeux tout comme les mesures d’accompagnement ne sont pas de même nature selon que la collectivité se situe sur un axe majeur de transports de marchandises majeur comme la Seine ou en bordure du canal du Midi.
Le tourisme fluvial est peut-être le champ par excellence de la conclusion de partenariats entre VNF et les communes.
Le tourisme fluvial progresse depuis 2009.
Si cette belle évolution reflète l’engouement du public pour le slow tourisme et le tourisme d’itinérance, elle est aussi le résultat des politiques menées pour rendre le réseau touristique fluvial plus sûr et plus accessible, pour développer et améliorer les services proposés aux clients et aux usagers, pour mettre en valeur le magnifique patrimoine fluvial français.
Les voies d’eau sont un atout majeur pour l’attractivité économique et touristique des territoires, et les chiffres prouvent que le tourisme offre aujourd’hui de véritables relais de croissance pour les zones irriguées. On estime en effet que le tourisme fluvial génère chaque année, 500 millions d’euros de retombées économiques au profit des territoires français. Ce n’est pas rien et de nombreux sites restent encore à valoriser.
Pour que les collectivités tirent le plus large bénéfice de cette situation, le travail de l’établissement est bien entendu conduit en concertation et en partenariat avec elles, afin d’inscrire le développement des projets dans le cadre des politiques locales d’aménagement et de développement économique portées par les territoires. Le contrat de canal du Nivernais, la convention d’itinéraire partagé sur la Sambre ou encore le contrat de stratégie partagée de la Sarre sont quelques beaux exemples des partenariats qui incarne la volonté partagée d’une gouvernance moderne et efficace des voies touristiques. Cette démarche doit être étendue.
Par l’objet même de sa mission -les réseaux et l’eau- VNF est un acteur de l’aménagement du territoire et un acteur du développement économique et de l’attractivité des territoires.
L’Etat, VNF et les acteurs locaux ont une immense responsabilité, celle de construire un réseau durable pour le transport fluvial, mais aussi de protéger un réseau vivant ; la voie d’eau est le seul axe de communication terrestre constituant un écosystème complet.
Sachons en tirer profit en en prenant grand soin.
 
 
Stéphane SAINT-ANDRE
Ancien Député Maire de Béthune
Ancien Président de Voies Navigables de France

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