Entre le XVIᵉ et le XVIIIᵉ siècle, l’Europe entre dans une période de profondes mutations. L’époque moderne voit émerger de nouvelles conceptions de la filiation, tout en conservant certains héritages du Moyen Âge. Le sang reste un critère essentiel, mais il n’est plus le seul. Le droit, l’État et la société redéfinissent progressivement ce qui fait une famille.
La continuité avec le modèle médiéval
Au début de l’époque moderne, la filiation reste largement fondée sur la naissance légitime. Comme au Moyen Âge, l’enfant né dans le mariage bénéficie d’un statut privilégié. La transmission du nom, des biens et du rang social repose encore sur la filiation par le sang, perçue comme un lien naturel et indiscutable.
Cependant, cette continuité masque des évolutions importantes. L’Église continue de jouer un rôle central dans la définition de la parenté, mais l’État commence à intervenir davantage dans les affaires familiales.
L’affirmation de l’État dans la définition de la filiation
À partir du XVIᵉ siècle, les monarchies européennes renforcent leur pouvoir. Elles cherchent à contrôler la population, les mariages et les successions. Ainsi, la filiation devient progressivement un enjeu administratif.
Les registres paroissiaux, généralisés au Concile de Trente (1563), permettent de suivre les naissances, mariages et décès. Cette innovation transforme la filiation en un fait juridique vérifiable, et non plus seulement en un lien social ou religieux.
La place des enfants naturels
L’époque moderne voit aussi évoluer le statut des enfants naturels. S’ils restent exclus de nombreuses successions, certains États assouplissent les règles. Des procédures de légitimation apparaissent, permettant à un enfant né hors mariage d’obtenir des droits, sous conditions.
Cette évolution marque une rupture avec la rigidité médiévale. La filiation devient un espace de négociation entre le sang, la loi et la volonté des parents.
Le rôle croissant du consentement et de l’affection
À partir du XVIIᵉ siècle, les mentalités changent. Le mariage n’est plus seulement une alliance entre familles, mais aussi une union fondée sur le consentement. Cette évolution influence la filiation : l’enfant n’est plus seulement un héritier, mais aussi le fruit d’un projet familial.
Les philosophes des Lumières, au XVIIIᵉ siècle, défendent une vision plus égalitaire de la famille. Ils critiquent les privilèges liés à la naissance et appellent à une réforme du droit familial.
Vers une nouvelle définition de la filiation
À la veille de la Révolution française, la filiation est à un tournant. Le modèle traditionnel, fondé sur la légitimité et le sang, est remis en question. Les idées d’égalité, de liberté et de droits individuels préparent les grandes réformes du Code civil de 1804, qui redéfinira profondément la filiation.
Ainsi, l’époque moderne apparaît comme une période de transition. Elle conserve l’héritage médiéval, mais ouvre la voie à une conception plus juridique, plus administrative et plus égalitaire de la filiation.
Pour mieux saisir les origines de ces transformations, consultez notre analyse de la parenté de sang au Moyen Âge.







Un commentaire