La Fondation Grameen Crédit Agricole, en partenariat avec CERISE+SPTF et le Financial Inclusion Equity Council (FIEC), publie ce jour les résultats d’une enquête de terrain inédite sur l’impact de la réduction de l’aide internationale dans le secteur de la finance inclusive.
Basée sur les témoignages de 86 répondants issus de 58 pays, dont près de 80 % de prestataires de services financiers, l’étude met en lumière les difficultés rencontrées par les institutions et leurs clients les plus vulnérables face à la contraction des financements internationaux. Elle souligne également les stratégies d’adaptation mises en œuvre et propose cinq axes d’action pour renforcer la résilience du secteur.
Une baisse historique des financements
La fermeture de l’USAID et la diminution des contributions de plusieurs pays européens marquent une rupture historique dans l’aide publique au développement. Selon l’enquête, 58 % des prestataires de services financiers ayant recours à des financements internationaux sont déjà affectés. Les impacts se traduisent par :
- des partenariats fragilisés (60 %),
- une dégradation de la qualité des portefeuilles (57 %),
- une contraction des ressources financières (53 %).
Les structures les plus vulnérables sont les petites institutions implantées dans des pays à risque ou fortement dépendantes des subventions. Pour elles, la baisse de l’aide signifie une capacité réduite à financer les clients à faibles revenus, à maintenir des services spécialisés ou à développer de nouveaux projets.
Des projets sociaux menacés
Plus d’un quart des répondants déclarent avoir dû interrompre des initiatives nécessitant une assistance technique ou des subventions, notamment dans des domaines essentiels : santé, eau, assainissement et hygiène (WASH), aide aux réfugiés ou égalité des sexes.
Pour les populations à faibles revenus, les conséquences sont directes : accès limité au financement agricole, au financement vert ou aux dispositifs d’inclusion. Au-delà des impacts immédiats, c’est l’avenir qui est compromis. Les investissements dans l’adaptation au changement climatique, la transformation numérique ou l’innovation sociale sont fragilisés, alors même qu’ils sont stratégiques pour la résilience des communautés.
Résilience et incertitudes
Malgré ce contexte, le secteur fait preuve de résilience. Les institutions financières adaptent leurs stratégies : elles renforcent la qualité des portefeuilles, recherchent de nouvelles alliances et mettent l’accent sur la protection des clients.
Si 67 % des répondants jugent que la situation ne s’améliorera pas d’ici 2026, 57 % estiment néanmoins que la finance inclusive résiste aux chocs géopolitiques et économiques. Le secteur ne se limite plus à élargir l’accès aux services financiers : il vise désormais un impact plus profond, en promouvant le bien-être financier, la résilience climatique et l’égalité des sexes.
« Cette enquête fournit des informations précieuses provenant d’acteurs de terrain en contact direct avec les populations bénéficiaires. Elle nous permet de mieux comprendre les défis actuels et d’orienter nos actions pour soutenir efficacement le secteur de la finance inclusive », souligne Véronique Faujour, Déléguée générale de la Fondation Grameen Crédit Agricole.
Cinq recommandations pour agir
L’étude appelle les parties prenantes à orienter leurs actions autour de cinq axes :
- Renforcer la coopération locale : développer des alliances stratégiques avec le secteur privé et les acteurs publics, soutenues par des mécanismes de garantie.
- Optimiser les financements mixtes : structurer des solutions adaptées aux réalités actuelles, favorisant la standardisation et la mise à l’échelle.
- Développer les synergies entre institutions : mutualiser ressources et innovations pour accroître l’efficacité, notamment dans les pays fragiles.
- Consolider la protection des clients : concevoir des produits adaptés et mieux comprendre les vulnérabilités pour améliorer la qualité des portefeuilles.
- Améliorer la mesure de l’impact : identifier les effets positifs et négatifs de l’inclusion financière et placer l’impact au cœur des discussions entre prestataires et investisseurs.
Une mobilisation nécessaire
La réduction de l’aide internationale met en péril des investissements essentiels pour l’avenir. Mais elle rappelle aussi l’urgence de repenser les modèles de financement et de renforcer les partenariats locaux. La finance inclusive, en quête de durabilité et d’équité, se trouve aujourd’hui à un tournant stratégique.







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