Violence à l’égard des femmes en Finlande : des progrès ont été faits dans tous les domaines, mais il faut améliorer la formation des professionnels et s’attaquer aux formes numériques de la violence
Dans son premier rapport thématique, le Groupe d’experts du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (GREVIO) salue les mesures importantes prises par la Finlande en matière de prévention et de lutte contre la violence à l’égard des femmes. Cependant, malgré les progrès réalisés dans les domaines correspondant aux quatre piliers de la convention, le GREVIO a recensé des aspects auxquels les autorités devraient consacrer des mesures supplémentaires pour se conformer pleinement à la. Convention d’Istanbul.
Depuis l’adoption de son rapport d’évaluation de référence en 2019, le GREVIO a constaté une série d’évolutions positives dans le cadre législatif finlandais. Il s’agit notamment de l’adoption d’une approche fondée sur le consentement pour la définition du viol et de modifications législatives visant à permettre la dissolution des mariages forcés. Le GREVIO se félicite également des amendements législatifs prévus pour conférer le caractère d’infraction pénale au mariage forcé et aux mutilations génitales féminines (MGF). Les autorités ont aussi renforcé la protection des victimes de violence domestique en réformant la loi finlandaise sur les ordonnances d’injonction. De même, plusieurs lois et politiques relatives à l’éducation ont été modifiées pour donner la priorité à l’égalité dans le système éducatif. En outre, le GREVIO constate avec satisfaction que le plan d’action pour la mise en œuvre de la Convention d’Istanbul reconnaît la nature genrée de la violence à l’égard des femmes. La Finlande a également renforcé le rôle du rapporteur national au sein du Bureau du médiateur anti-discrimination afin de faciliter le suivi et l’évaluation indépendants des politiques de lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique.
Parmi les autres mesures notables de lutte contre la violence à l’égard des femmes, on peut citer l’extension du réseau de conférences interinstitutionnelles sur des cas individuels (MARAC), qui permet une meilleure évaluation et gestion des risques, y compris le dispositif des ordonnances d’urgence d’interdiction et des ordonnances d’injonction. Tout en reconnaissant que les réseaux MARAC apportent une valeur ajoutée dans les services de protection sociale de comté où ils ont été établis, le GREVIO fait remarquer que beaucoup de régions en restent dépourvues et que, pour ce qui est des réseaux existants, les méthodes de travail et la composition varient considérablement d’un réseau à l’autre.
En outre, des mesures ont été prises pour étendre le réseau des centres de soutien aux victimes d’agressions sexuelles (SERI) et pour améliorer l’offre de services de soutien et d’hébergement spécialisés pour les femmes victimes de violences qui ont des problèmes d’addiction.
Malgré les progrès accomplis, un motif de préoccupation persistant en matière de prévention est l’absence de formation continue obligatoire sur les questions liées à la Convention d’Istanbul pour nombre de groupes professionnels concernés, notamment les juges et les procureur·e·s. Si beaucoup reçoivent une certaine formation initiale, la formation ultérieure reste facultative, ce qui ne favorise pas leur compréhension et leur connaissance des diverses formes de violence à l’égard des femmes. Le GREVIO souligne donc la nécessité d’améliorer la réponse de la justice pénale à la violence à l’égard des femmes, par exemple pour mieux prendre en compte la dimension numérique croissante de la violence à l’égard des femmes, pour garantir une plus grande efficacité des ordonnances d’urgence d’interdiction et de protection et pour réduire le nombre d’affaires classées sans suite en raison de la médiation.
Le groupe d’experts invite également les autorités finlandaises à remédier à l’absence de collecte systématique de données permettant d’avoir une idée précise des taux de signalement, de poursuite, de déperdition et de condamnation dans les affaires de violence à l’égard des femmes.
En ce qui concerne les victimes sámes de la violence à l’égard des femmes, le GREVIO constate avec préoccupation qu’elles ne bénéficient pas de services généraux et spécialisés qui tiendraient compte de leurs spécificités culturelles et linguistiques, et que le nombre de refuges reste insuffisant sur le territoire sáme.
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Le GREVIO est l’organe d’experts indépendant chargé de suivre la mise en œuvre de la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (dite « Convention d’Istanbul ») par les Parties. Ouvert à la signature de tous les pays du monde, en plus des 46 Etats membres du Conseil de l’Europe, le traité a été ratifié jusqu’à présent par 38 Etats et l’Union européenne, et signé par six autres.